Un monde englouti.
C'est un documentaire très original auquel nous avons droit ; Agnès Varda filme la vie des commerçants de la rue Daguerre, à Paris, où elle vit encore, entre 1975 et 1976. Avec près de 40 ans de...
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le 14 févr. 2013
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Le concept est aussi simple que farfelu et attachant : Agnès Varda s'est mis en tête d'aller interroger les artisans et commerçants de son quartier, dans le 14ème arrondissement de Paris, dans un périmètre d'action défini par un cercle centré sur son appartement et de rayon égal à la longueur du câble électrique de sa caméra. En résulte une galerie de portraits terriblement attachants, en prise directe avec le Paris des années 70... qui ressemble à tout sauf à Paris. Avec ses cadrages en longue focale qui se concentrent presque exclusivement sur ses sujets, Varda élimine l'arrière-plan et constitue une mosaïque de têtes et d'accents colorés. Les Parisiens de la rue Daguerre sont des types (et des "typesses", comme Agnès) qui viennent d'Aquitaine, de Bretagne, de Normandie, d'Auvergne et de Tunisie. Sans éléments de contexte, impossible d'imaginer qu'on se trouve au centre de la capitale.
Ce sont les personnes bien plus que leur métier qui intéressent Varda, reléguant principalement leur savoir-faire à un montage parallèle un peu hésitant avec les tours de magie réalisés par Mystag le magicien — un fil rouge un peu fragile et maladroit mais loin d'être désagréable. Au détour d'un tour de magie, d'ailleurs, on peut lire la une d'un journal : "Avortement : c'est l'heure de vérité", témoin des débats de l'époque, peu avant que la loi Veil soit adaptée le 17 Janvier 1975. Indépendamment des quelques lettres incendiaires que la réalisatrice recevra chez elle a posteriori, elle adopte une position très détachée, comme toujours, en déclarant qu'il s'agit-là "des archives pour les archéo-sociologues de l'an 2975".
Varda parvient avec ce dispositif minimaliste à rendre le pittoresque incroyablement touchant, et se fait involontairement témoignage d'un passé déjà antédiluvien : on y croise les marchands de parfum, de boutons, d'eau de Cologne artisanale et de brillantine (très attachante Madame Chardonbleu, fragile et lunaire), le couple de coiffeurs, l'horloger, le moniteur d'auto-école, l'épicier tunisien, le boucher et le boulanger. Autant d'instantanés qui ont travaillé leur singularité avec le temps, en 45 ans, et capté avec la curiosité bienveillante caractéristique de la réalisatrice.
http://je-mattarde.com/index.php?post/Daguerreotypes-de-Agnes-Varda-1975
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Créée
le 5 juil. 2020
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