Daisy Diamond
6.2
Daisy Diamond

Film de Simon Staho (2007)

Si le film s'était arrêté à la 43e minute, je lui aurais attribué un 10/10.
Tout démarrait si bien...

  • Noomi Rapace extraodinaire

Noomi Rapace m'a coupé le souffle. Je l'ai découvert dans Passion de De Palma mais c'est ce soir que j'ai réalisé que c'est une actrice grandiose. Quoique l'on pense du film, ce rôle a vraiment le mérite de lui donner du poids, et elle saisit bien cette opportunité pour nous offrir une prestation bluffante. Le choix de faire beaucoup de gros plans sur son visage est tout à fait à propos, parce qu'elle a un charisme fou et un visage magnifique.

  • Il y avait les ingrédients

(Expression que pourrait utiliser tout entraîneur de foot en conférence de presse après un résultat décevant).

En effet, le film est pétri de qualités :

— Des dialogues percutants.

— Des scènes sublimes avec cette jeune mère et sa fille ; notamment celle devant une vitrine d'écrans TV dans la rue.

— Des mises en abyme habilement menées entre la vie du personnage et les rôles qu'elle interprète.

— Les échos avec Persona de Bergman qui ne sont pas du tout pour me déplaire.

— Et puis Noomi Rapace, enfin !

  • 43 minutes et 20 secondes, l'évolution du film est regrettable

Et puis voilà, la première moitié du film laisse place à une seconde partie maladroite.

Alerte spoiler dès la prochaine phrase.

J'aurai été tenté de dire que le film meure avec la pauvre petite Daisy, mais c'est tout de même plus nuancé que ça.
La deuxième partie a tout de même des qualités :
— la transformation cynique du personnage après cet infanticide,
— l'intérêt soudain de sa voisine pour son sort - cruel car cette sollicitude aurait pu être salvatrice plus tôt,
— et les apparitions spectrales d'une Daisy plus âgée - risqué car cela aurait pu être un peu tarte - qui ne sont pas inintéressantes.

Mais cette seconde partie sponsorisée par les godes-ceintures donne lieu à des situations invraisemblables qui finissent par donner trop de lourdeur au scénario et au côté malchanceux de l'héroïne.
Anna, renonçant à son rêve, et renonçant au bonheur, finit par se prostituer.
Ce nouveau paradigme passe par une scène où elle se coupe les cheveux, enfile une perruque blonde et épouse un look vulgaire qui sied à sa nouvelle profession. S'ensuit une scène volontairement immonde où elle tournoie telle une marchandise sur un présentoir, nue, avec sa nouvelle apparence artificielle, toute dégoulinante de maquillage.
Cette prostitution s'effectue en deux actes ; car elle a d'abord accepté de s'offrir à un metteur en scène et une réalisatrice de films d'animation, avant de réellement entrer dans le milieu de la prostitution. Ces rencontres un peu caricaturales avec des personnages vicieux n'apportent plus vraiment au film. On sait qu'Anna doit faire face à un monde hostile et cynique. Un troisième personnage, le proxénète transsexuel, vient encore alourdir le tableau.
Anna offre son corps pour avoir des opportunités qu'on ne lui offre pas, se laisse sodomiser par des inconnus pour gagner de l'argent, accepte de dominer sexuellement un client masochiste, et choisit comme nouveau pseudo d'escort-girl le sobriquet de Daisy Diamond, soit le prénom de sa fille. On est au comble du cynisme. Mais ce cynisme s'essouffle dans sa caricature, et lasse.

  • Comment conclure le film ?

Il faut désormais une chute. Ce ne sera pas celle du dernier étage de l'immeuble d'Anna. Elle renonce à sauter dans le vide. Elle préfère s'adonner une dernière fois à un client tourmenté qui semble avoir la même attitude que le père violent de sa fille, dans une scène confuse et dure à digérer.
La chute, c'est qu'Anna obtient enfin le rôle de sa vie. Puisqu'elle obtient du réalisateur "testeur de figurantes" qu'il tourne son histoire, son film, en reprenant les événements de sa vie. Daisy Diamond se conclut par une scène où Anna se laisse couler dans la même baignoire où elle a mis fin aux jours de son nourrisson, sous l'objectif voyeur du metteur en scène et de son chef-opérateur.
Anna finit par réaliser son rêve, mais ce fut par le prix de la vie de son enfant.

Ce film mérite d'être vu et malgré ma déception finale je lui attribue tout de même un 7/10 (oui oui !) car il a réussi à m'emporter durant la première partie, avec un dénouement lors de cet infanticide qui aurait pu le conclure et en faire un excellent moyen-métrage. Dommage...

MatthieuJeuland
7
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le 22 août 2019

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