Habitué aux récits tirés de faits réels ("Alamo", "The rookie" ou encore "The blind side"), le cinéaste John Lee Hancock s'attarde cette fois sur les rapports conflictuels entre le nabab Walt Disney et la romancière Pamela Travers, lors du long développement de l'adaptation cinématographique de "Mary Poppins".
Longtemps en gestation (le projet remonte à la toute fin des années 90), le film est finalement co-produit par les studios Disney, qui cherchaient avant tout à garder un oeil sur la façon dont serait décrit leur fondateur, et s'attarde principalement sur la personnalité complexe de Travers et sur son enfance, le papa de Mickey Mouse, incarné avec une bonhommie inappropriée par Tom Hanks, n'ayant qu'un rôle secondaire.
Basé sur les enregistrements et la correspondance entre Disney et Travers, "Saving Mr Banks" prendrait des libertés douteuses avec la véracité des faits (les larmes de Travers pendant la projection ne serait pas du à l'émotion mais bien à la colère), afin de livrer un produit inoffensif et arrangeant pour tout le monde. Ne connaissant pas les faits exacts, je me garderais d'émettre un quelconque avis sur ce point, mais le fait est que l'ensemble demeure horriblement ampoulé.
Avec la subtilité d'un bulldozer, le film de Hancock tente de comprendre la personnalité complexe de Travers, nous la présentant forcément comme une insupportable chieuse, une artiste névrosée et hantée par une figure paternelle dévorée par l'alcool et des rêves inaboutis. Dans le rôle de la créatrice de la plus célèbre des gouvernantes, la comédienne Emma Thompson peine à trouver l'émotion juste, pas aidée par une écriture d'une facilité navrante.
Mis en scène sans grand génie, "Saving Mr Banks" en fait des tonnes, noie tout embryon d'idées séduisantes sous une avalanche de bons sentiments, multipliant de plus les flashbacks une scène sur deux, histoire de nous faire bien entrer dans la caboche que l'enfance de Pamela Travers lui a laissé des séquelles émotionnelles.
Un pareil sujet méritait un traitement plus subtil et frondeur que ce produit académique sans saveur et interminable, dont on ne sauvera que quelques belles reprises de la partition du film enchanteur de Stevenson.