Daydream semble avoir été conçu pour catharsiser une probable phobie du dentiste par son réalisateur, Tetsuji Takechi, qui multiplie les zooms sur des bouches baveuses et soumises à des exactions de miroir et de fraises, sur fond de bruits de vrille incessants. Le professionnel en odontologie incarne bien vite une figure vampirique de dominateur abusif qui va soumettre sa victime à ses perversions maltraitantes, dans une fantasmagorie étrange à laquelle assiste désespéré un autre patient dont le désir de sauver la demoiselle en détresse est sans cesse contrarié, tant par le bourreau que par sa proie. Non sans une certaine ambivalence à s'exposer durablement à l'érotisation des violences exercées (shibari, gégène, etc.) qui paraissent conserver leur puissance excitatrice, ce qui donne au film un aspect proto-Roman porno.
Étonnamment, les thèmes de la domination masculine inexorable (la tentative de fuite dans l'escalator qui ramène toujours la femme vers son suppliciant) et de l'indifférence sociale aux violences sexistes et sexuelles (le meurtre au milieu d'une foule passante et désintéressée) sont explicites alors qu'on peut s'interroger sur la volonté de Takechi de les conscientiser ainsi, le film ayant surtout été marketté comme le premier pinku à gros budget et les critiques de l'époque ne semblant jamais relever ces réflexions. De plus, le réalisateur a pondu en 1981 un remake pornographique, première sortie en salle pour un film X au Japon ! Quel jusqu'au boutisme artistique.
Daydream a sans doute cristallisé sans s'en rendre compte des processus désormais plus considérés, ce qui fait de lui une curiosité pas inintéressante. Mais à savoir qu'il faut tout de même composer avec un traitement très expérimental, dans un noir et blanc parfois crasseux de scènes qui s'étirent sans dialogue, si ce n'est les gémissements lascifs et les bruits de fraise. Une approche assez éprouvante pour le spectateur, qui là encore tranche complètement avec l'idée d'un blockbuster érotique commercial.