Grâce à un thé concocté par une jolie Mexicaine, une équipe de chercheurs met au point un sérum permettant d'aller gambader dans une autre dimension où sévit un monstre dévoreur d'enfants...
Il y a toujours quelque chose de fascinant à rationaliser les rencontres surnaturelles par une approche scientifique et, de ce point de vue, "Discarnate" s'en sort plutôt mieux que pas mal de films récents ayant un point de départ similaire (coucou "L'Expérience Interdite" de 2018 au hasard). La logique d'entre-deux mondes qui va résulter de leur expérience et animer la majeure partie de l'histoire tient debout et va offrir une progression et une richesse d'apparitions s'inscrivant dans une mythologie loin d'être inintéressante. De plus, il s'y annexe une créature antagoniste qui, certes, est un assemblage de plusieurs éléments vu déjà ailleurs (sa connotation enfantine, son pouvoir, son habitat à la "Stranger Things", etc), mais dont le caractère particulièrement vicieux pour manipuler les héros va faire tout le sel de ce "Discarnate". Le film n'est en effet jamais meilleur que lorsqu'il explore tout ce que lui permet ce mélange scientifique et chimérique en matière de constitution d'univers généreux en méandres à représenter à l'écran, l'idée d'effet-miroir de ce sérum en est d'ailleurs le parfait exemple en plaçant les scientifiques et la créature sur le même statut de découverte de nouveaux moyens pour parvenir à leurs fins. Bref, contrairement à pas mal de ses collègues souvent fatigués en ce domaine, "Discarnate" a conscience des opportunités que lui offre son pitch et s'en tire habilement en utilisant bon nombre de ses plausibles ramifications (jusqu'à son terme avec un épilogue réussi).
Ceci étant dit et salué, il n'en demeure pas moins que le déroulement du film s'enfonce, lui, dans de trop nombreux poncifs de film d'épouvante lambda pour réellement convaincre. Sa mécanique toujours connue par avance va finalement peu à peu le desservir et même, oserait-on dire, le désincarner (standing ovation). Alors que tous ces personnages ne sont jamais plus intelligents devant l'étendue le phénomène en entité de groupe, "Discarnate" va passer une grande partie de son temps à les séparer pour privilégier les manifestations étranges et, ensuite, les mises en situation de danger plus que faciles jusqu'à l'incontournable combat final. Dans ce schéma si classique, pour la plupart, ils n'auront jamais vraiment le temps d'être développés correctement (la courte durée du film n'arrange rien), quelques répliques pour les plus secondaires (les deux frères) et des esquisses grossières pour les autres marchant principalement en duos affectifs. Ainsi, si l'on peut aisément comprendre l'obsession émotionnelle du chef d'équipe pour cette expérience, le personnage ne sera uniquement défini que par ce prisme, ce qui enlèvera une part considérable de sa crédibilité scientifique quand il sera poussé, sans se poser de questions pertinentes, dans ses derniers retranchements par la créature.
L'aspect rétro vaguement 80's de l'ensemble, pourtant agréable ou amusant par certains aspects (l'atmosphère brumeuse de l'autre monde, une créature qui aime bien se montrer face caméra, les ralentis d'une autre époque, ...) participera aussi à enfermer le film dans son canevas de stéréotypes hélas juste bon à détruire l'identité que pouvait lui offrir la découverte de sa mythologie.
Bonne surprise en termes d'univers, "Discarnate" n'a hélas qu'une ossature scénaristique standarde à sa disposition pour le développer. Il aurait fallu encore quelques tests en terrain moins connu à ce niveau pour que le sérum du film nous propose un trip d'épouvante vraiment original...