Défense d'atterrir est un film catastrophe coréen qui nous fait vivre une attaque bactériologique à bord d'un avion. Un jeune homme suffisamment doué et dérangé pour cultiver un virus mortel et entreprendre de se suicider en le répandant, embarque pour un vol à destination d'Hawaï. Un ancien chef de police, In-ho, est mis au courant du projet d'attentat et réalise, au moment où l'avion décolle, que sa femme est à bord. Durant le vol, le terroriste répand une poudre dans les toilettes. Un premier passager meurt subitement dans d'horribles souffrances. Bientôt, une vidéo mise en ligne par le terroriste circule sur les réseaux. Les passagers de l'avion le reconnaissent et parviennent à le maîtriser mais ne peuvent l'empêcher de diffuser son poison. Avant de mourir, le déséquilibré lui-même contaminé, redit sa satisfaction de voir succomber un grand nombre de personnes.
L'épidémie va rapidement s'étendre. Bientôt, les passagers s'affrontent pour séparer les contaminés des autres. Le pilote s'écroule dans le cockpit, il est remplacé par le copilote également atteint.
Au sol, le policier In-ho se démène pour retrouver l'origine du virus. L'entreprise qui employait le terroriste refuse de coopérer. Un des employés lui assure pourtant que le terroriste qui était alors son collègue lui a extorqué une cellule souche du virus en prétextant vouloir soigner des gens. Soutenu par les autorités, le policier obtient finalement l'accord de l'entreprise (une société américaine) pour investiguer. Un antivirus serait disponible.
L'avion cherche à se poser. On dénombre déjà une quarantaine de morts. Hélas, ni les États-Unis, ni le Japon ne leur accordent d'autorisation. Le copilote n'est plus en mesure de naviguer. Il passe les commandes à un ex-pilote qui se trouve à bord mais qui a dû cesser d'exercer après avoir été impliqué dans un accident ayant entraîné la mort de personnels de bord dont la femme du copilote. Les deux hommes parviennent cependant à s'entendre. L'ancien pilote surmonte sa peur et accepte de reprendre du service. Il ne connaît pas l'appareil et le carburant commence à manquer.
L'avion est revenu au-dessus de la Corée. Au sol, la nouvelle de son retour divise. L'antivirus sera-t-il efficace ? L'aéroport est devenu le lieu de manifestations entre ceux qui sont pour et ceux qui sont contre. Risquant le tout pour le tout, le policier va s'inoculer le poison et demander à essayer l'antivirus. Il est sur le point de succomber alors que les occupants de l'avion ont pris le parti de ne pas se poser pour éviter la propagation du virus.
Tandis que le contact a cessé, des signes d'amélioration de l'état du policier sont constatés. On tente de joindre l'équipage en envoyant des sms. Quand l'appareil reprend sa trajectoire vers l'aéroport, ses moteurs s'arrêtent faute de carburant. Il va tenter d'atterrir en mode planeur sur une piste trop petite...
Defense d'atterrir présente les caractéristiques classiques du film catastrophe. La figure du déséquilibré, chef d'orchestre d'une tuerie programmée à bord d'un avion devenu escape room, répond aux standards de la misanthropie moderne dont le serial killer est l'émanation. La psyché toute-puissante du tueur associée à son jeunisme tranche avec l'image d'une police dépassée, représentée par un ancien chef aux allures balourdes et dont la femme, en partance pour Hawaï, s'occupe comme s'il s'agissait d'un gros toutou (elle lui a laissé une marmite de soupe qui fera la semaine). Mais bon, comme on dit, c'est dans les vieux pots... Le policier aux allures de Colombo va finalement s'avérer être de taille pour relever le défi. Bien que mort, le génie du mal sème une belle pagaille dans les aéroports où personne ne veut de l'avion infecté sur son sol. Une belle image des sociétés modernes !
Defense d'atterrir est, au premier abord, un film sur la décorrélation entre l'individu et la société qui ne calcule plus ceux qu'elle engendre. Le policier qui doit payer de sa personne pour sauver les autres et la tour de contrôle, girouette des atermoiements de la masse, représentent cette société tourneboulée. Le serial killer surgit donc comme un détonateur, c'est lui qui en mettant à mal l'ordre établi va révéler son inertie, son incapacité à faire face à l'imprévu. Contre lui, les forces de l'ordre ont toujours un temps de retard. Les rôles sont inversés ; celui qui est traqué devient le meneur. Cette inversion assigne au criminel une fonction nécessaire, presque positive dans l'ordre des choses où il s'agit de révéler ce qu'il y a désuet en vue de le changer. En mettant à la manoeuvre un tueur génial, le film catastrophe est donc d'abord un miroir tendu à la société sommée de muter au profit d'un modèle moins statique, moins étatique mais plus technique et protéiforme. De ce point de vue, le film est dans la trajectoire du film catastrophe classique qui nous dit qu'il y a le feu dans la maison et qu'il faut en construire une nouvelle plus intelligente et plus réactive, une maison qui réduirait la souffrance qu'elle engendre en tant que communauté avec ses règles et qui réglerait ainsi le problème du serial killer. Bienvenue dans la société moderne libérale !
Face à ce constat pourtant le film propose une solution. La force du groupe, son abnégation font office d'antidote à la panique générale et à l'éparpillement des volontés. Même si à un moment nous assistons à une dispute où un passager parvient à semer la discorde, le groupe résiste et affiche sa force et sa détermination au point d'opter pour le sacrifice dans un ultime élan patriotique. On ne verrait pas cela dans une fiction occidentale, non pas parce que les personnes sont moins courageuses mais parce l'identité du groupe est rarement assimilée à une instance décisionnelle permettant de faire évoluer un scénario.
Défense d'atterrir est donc un film qui contient l'émotion au sens où l'intégrité et la dignité du sujet ne font pas l'objet d'une déconstruction perverse. Le sujet est tenu par le groupe et il en tire une force qui remet la notion de liberté à sa vraie place. On est libre quand on n'a plus peur.