Une chronique géographique à hauteur d’homme

Shibati n’est plus. Ce quartier populaire de la tentaculaire métropole chinoise de Chongking a laissé place à un ensemble moderne de gratte-ciel rutilants, au détriment des habitants dépossédés de leur mémoire collective. Pour documenter ces mutations urbaines, Hendrick Dussolier a préféré l’humain au factuel, la discrétion au voyeurisme, la sobriété au sensationnel. Caméra en main, il s’est perdu dans les méandres du quartier, récoltant des propos spontanés bien plus révélateurs que des chiffres et statistiques, s’attachant à un jeune garçon fasciné par la ville moderne et à une vieille femme dont la résilience et la philosophie sont en eux-mêmes une formidable leçon de vie. C’est sans doute pour ça que Derniers jours à Shibati marque durablement. Pas de discours surplombant, pas de voix-off, mais simplement des images choisies et des fragments de quotidien qui disent à eux seuls bien plus que des mots. En collectant avec justesse les derniers souffles d’un quartier aujourd’hui disparu, Hendrick Dussolier livre une chronique géographique et sensible, témoignage à hauteur d’homme des mutations urbaines qui défigurent un pays bouleversé par la métropolisation galopante et la frénésie immobilière. Un cinéma intelligent, efficace et touchant.