L'un des rares Tavernier que je n'avais pas vus et l'un des meilleurs. Piccoli joue le rôle d'un cinéaste (il est aisé d'y voir Tavernier en creux) qui quitte le domicile familial, avec l'accord de son épouse, pour louer un appartement dans un quartier populaire de Paris, afin de s'isoler pour écrire son prochain film. Il y a fait la rencontre des habitants qui ont des préoccupations éloignées des siennes : joindre les quatre bouts chaque fin de mois, et surtout une lutte acharnée contre le propriétaire de l'immeuble, riche industriel possédant plus de 800 immeubles dans Paris, qui les exploite via des bails honteux et n'hésite pas à expulser à la moindre remarque. Parmi ces voisins, le cinéaste rencontre une jeune femme, divine Christine Pascal, dont il tombe éperdument amoureux. Cet amour et cette lutte nouvelle qu'il fait sienne rapidement vont littéralement changer sa vie. Très bon film, donc, au ton libre et attachant, à la mise en scène sans cesse inventive, et servi par des acteurs prodigieux, notamment toute la troupe du Splendid, au début de sa carrière, et en pleine forme, et une excellente musique jazz dont l'un des musiciens n'est autre que John Surman. Le film est formidable parce qu'il joue sur plusieurs tableaux à la fois, drame, comédie, histoire d'amour, combat social, et il est convaincant sur tous, et ces derniers se mêlent admirablement bien pour créer un ensemble d'une grande homogénéité.