Il est toujours délicat de s’attaquer à morceau d’histoire telle que la Guerre d’Algérie même quand il s’agit de l’adaptation d’un roman, qui plus est, signé Laurent Mauvignier dont le style très littéraire n’est pas forcément ce qu’il y a de plus simple à adapter à l’écran… d’autant plus quand les points de vue sont multiples et que le récit se situe sur deux niveaux de temporalité.
Comme pour le roman, le film se construit en flash-back, avec une première partie qui laisse augurer le pire, avec un jeu et une mise en scène digne d’un mauvais téléfilm où chaque ligne de dialogue semble récitée, surlignée notamment avec un Depardieu en roue libre, parfois même assez gênant dans son jeu, en vieil alcoolique bougonnant et plein de rancœur. Même Catherine Frot si souvent convaincante semble à côté de son personnage. C’est sans doute Darroussin qui s’en sort peut-être le mieux avec son personnage d’homme mutique.
Et que dire de la mise en scène de Lucas Belvaux très laborieuse quand il s’agit de filmer une scène de repas qui tourne au règlement de compte entre feu-de-bois (Depardieu) et ses anciens compagnons avec lesquels il a combattu en Algérie et dont chacun semble porter encore en lui un lourd traumatisme.
Pour tenter de comprendre la source de cette souffrance et de cette violence encore vive, Lucas Belvaux nous replonge dans le passé, dans cette fameuse “guerre sans nom” avec cette fois quelques jeunes acteurs un poil plus convaincants (Yoann Zimmer, en tête) qui essaient tant bien que mal de donner corps à une histoire construite par séquence pour évoquer ce qu’était la guerre d’Algérie, telle qu’on la connaît aujourd’hui à travers les documentaires et témoignages mis en lumière au cours des décennies passées et pour tente de comprendre pourquoi elle a été si traumatisante pour ceux qui en sont revenu.
Malheureusement Lucas Belvaux ne parvient jamais à trouver la distance nécessaire avec le roman, proposant un film longuet et trop didactique dans son ensemble, qui n’arrive jamais à se détacher du texte d’origine, se contentant d’en proposer une version sans doute fidèle et respectueuse mais bien trop sage et bien trop plan-plan pour se révéler convaincante malgré les thèmes forts (la culpabilité, le ressentiment, la trahison…) qui traversent le récit.
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