Cheap the faith
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Avec The Mauritanian, Kevin McDonald réalise un film glaçant mais nécessaire qui met enfin en lumière le (dys)fonctionnement de Guantánamo, prison d'État et véritable zone de non-droit où le mauritanien Mohamedou Ould Slahi, magistralement incarné par Tahar Rahim, y vécut un enfer pendant plus de 14 ans...
Quelques mois après les attentats du 11 septembre 2001, Les Etats-Unis créent un camp à Guantánamo, base navale américaine située au sud de...Cuba, l'un des éternels ennemis de l'Oncle Sam ! Le but est d'y regrouper et juger tous les potentiels militants et terroristes islamistes, arrêtés à travers le monde, qui pourraient avoir un quelconque lien avec cette funeste journée où l'Amérique fut attaquée sur ses terres. Une manière aussi de priver ses ennemis du système de justice fédéral car le camp est situé en dehors du territoire américain... Critiqué, dénoncé par de nombreuses personnalités politiques américaines et internationales, qualifié de « zone non-droit », ce camp que souhaitait fermer Barack Obama reste encore aujourd'hui en activité...
Parmi les près de 800 détenus qui y ont séjourné, on retrouve de nombreux véritables terroristes mais également des innocents victimes d'une volonté de vengeance aveugle. Parmi eux, Mohamedou Ould Slahi, un mauritanien ingénieur ayant vécu en Allemagne. Le film de Kevin McDonald, ancien documentariste et réalisateur du Dernier roi d'Écosse, s'appuie sur le récit de Slahi, Les carnets de Guantánamo, écrit durant sa détention. Malgré un classicisme qui aurait pu le desservir, The Mauritanian s'avère être un film coup de poing et politique qui accuse l'État américain frontalement, Donald Rumsfeld étant par exemple cité nommément pour son autorisation de l'utilisation de la torture sur les détenus... Ce qui fera d'ailleurs dire au personnage de Foster « qu'avec Guantánamo, ce ne sont pas les accusés qu'on éloigne des tribunaux...mais leurs gardiens. » Le réalisateur a également le mérite d'aborder un sujet étrangement boudé par le cinéma depuis 20 ans, même si on peut comprendre les réticences des producteurs américains...
L'HOMME QUI VOULAIT PARDONNER
D'une manière peu surprenante The Mauritanian reprend la trame du film de prison et d'enquête judiciaire, en minimisant certains axes comme la difficulté de défendre un « ennemi » de l'État et l'examen de conscience qui va avec. Par chance, il est servi par un impressionnant casting qui permet clairement au film de s'élever. La trop rare Jodi Foster en avocate militante, froide et sincère, Shailene Woodley en assistante idéaliste et Benedict Cumberbatch en procureur militaire ayant un compte personnel à régler, sont parfaitement justes. Mais si la réalisation emprunte des chemins souvent convenus, avec pléthore de flash-back, elle n'en est pas moins des plus efficaces, lorgnant par moments vers le thriller. Parmi les réussites, on ne pourra que saluer l'utilisation d'une image resserrée pour les retours vers le passé de Slahi. Le spectateur se retrouve ainsi via ce format happé par l'histoire, puis terrorisé par les tortures invraisemblables endurées par l'« accusé » (humiliations sexuelles, entraves, privation de lumière, de nourriture, « écoute » intensive de Hard Rock (!?)...).
Mais c'est bien la performance de Tahar Rahim qui ici frappe les esprits et vaut à elle-seule la vision du long-métrage auquel on préférera le titre original bien plus cohérent que le français consternant de banalité... Révélé déjà dans un rôle de prisonnier, radicalement différent, dans Un prophète, le français démontre une nouvelle fois son immense talent dans un rôle qu'il endossa totalement au point de perdre une dizaine de kilos et de finir le tournage, situé en Afrique du Sud, au bord du Burn-out.
Aussi étrange que cela puisse paraître, la fin se révèle presque optimiste grâce au véritable Mohamedou Slahi, qui d'ailleurs apparaît via l'utilisation d'images d'archives. Lui qui durant sa détention perdit sa mère, joliment incarnée par Baya Belal, et son frère, n'a désormais plus que le mot de pardon à la bouche, un pardon qui « est une faveur pour toi-même, qui permet d'être libre, de s'évader... ». Encore aujourd'hui en 2022, il reste un « prisonnier » n'ayant toujours pas le droit de quitter la Mauritanie et ses superbes décors, dont la plage de Nouakchott utilisée au début du film.
(Retrouvez l'évaluation de la partie technique de l'édition Blu Ray-dvd de métropolitan par ici : http://www.regard-critique.fr/rdvd/critique.php?ID=6678)
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Créée
le 12 janv. 2022
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