Initialement très sceptique, "Die freunde der freunde" aura fini par m'emporter après une première partie qui ne se laisse pas facilement appréhender, tant sur le plan de la narration que de l'esthétique. Une qualité d'image très singulière, une sorte de saleté travaillée ou du moins contenue, un peu comme dans un film du dogme, sauf qu'ici tout ne donne pas l'impression d'avoir été filmé à l'arrache, au petit bonheur la chance. Une histoire somme toute assez banale, dont on peine au début à cerner les enjeux, entre plusieurs relations d'amours et d'amitiés sans véritable charpente. Et pourtant, peu à peu, l'ambiance étrange du film gagne du terrain et tisse sa toile envoûtante.


Étrange visuellement, bien sûr, mais aussi dans le mélange des genres diffus qui est savamment entretenu. Il y a une très fine couche de fantastique (à défaut de trouver un meilleur qualificatif pour cette histoire de vision morbides prémonitoires) qui vient se glisser sur le tableau bigarré d'une jeunesse allemande. L'apparente légèreté de l'histoire cède progressivement du terrain au profit d'une peinture presque naturaliste de ce microcosme, a priori toujours éclairé à la lumière naturelle, jusque dans les séquences à l'érotisme plutôt bien maîtrisé. Il manque seulement un vrai budget (c'est un téléfilm réalisé pour la télévision allemande) pour donner pleinement corps à de telles aspirations.


Mais si on ne prête pas attention aux quelques maladresses stylistiques propre à une telle production (ce qui ne l'empêche pas de produire ponctuellement des séquences graphiquement très réussies), l'ensemble fonctionne. Il y a un vrai savoir-faire dans la façon de raconter une histoire à travers les yeux du protagoniste, en essaimant quelques détails plus ou moins signifiants, en esquissant seulement quelques traits de ses connaissances, comme il les connaît et les voit lui-même et non pas comme un réalisateur omniscient voudrait ou pourrait nous les décrire. Quelques touches suffisantes pour distiller une poésie adolescente originale, et quelques incertitudes partagées pour un portrait vaguement et agréablement réaliste.


[AB #190]

Morrinson
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le 19 janv. 2017

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