Dilili à Paris, le masqué, il a failli boycotter. Car Michel Ocelot, c'est loin d'être son copain, surtout après un Kirikou en exploitation triple, qui, malgré lui, charriait les pires images d'un certain colonialisme béat sous couvert de célébration de souvenirs de jeunesse et de la culture locale. Problématique quand même...


Princes et Princesses avait été à peine mieux accueilli, surtout après le succès décrété à l'époque de sa sortie en salles.


Behind passera sous silence les déclarations présomptueuses de l'autoproclamé pape de l'animation à la française, qui en profitait pour tirer tout le temps la couverture à lui et dénoncer les vilaines méthodes pas belles de la souris aux grandes oreilles et de l'exploitation de son succès. Rigolo quand, tout d'abord, on nous avait juré, la main sur le coeur, que Kirikou devait rester à jamais fils unique...


Tout cela pour dire que Dilili à Paris, bah, c'était mal parti. Et que n'est qu'à la faveur de la qualité toute relative de Venom que la séance a été finalement envisagée.


Le plan inaugural de l'oeuvre saisit, quand le spectateur est amené à penser que les premières minutes de Dilili à Paris se déroulent dans un pays proche de celui du petit Kirikou... Jusqu'à ce que la caméra recule un tout petit peu pour élargir la scène... Et comprendre que ce sont finalement de pauvres kanaks parqués et mis en scène comme dans un zoo...


Michel Ocelot réussit donc, seulement en quelques secondes d'animation, à synthétiser son propos sur la différence et le respect bien plus adroitement que sur l'ensemble de son oeuvre passée. Discours relayé par quelques réflexions sur les origines métissées de son héroïne, trop blanche dans son pays d'origine, mais trop noire de peau pour les Parisiens.


Behind n'en attendait pas tant et a donc remis les compteurs à zéro dans son appréciation du dernier opus de Michel Ocelot, enchanté par une petite kanake intrépide moins tête-à-claques que son grand frère de lait. Et si l'intrigue est des plus classiques, ce que n'attendait pas le masqué, c'est la magnifique traversée de Paris offerte par le réalisateur, sur fond de photos légèrement retouchées afin de rendre plus tangible et magique encore l'atmosphère belle-époque qui se dégage.


Au point de se rapprocher d'oeuvres comme le superbe Zarafa, ou de faire de la ville lumière un des personnages principaux du film, comme dans le dystopique Avril et le Monde Truqué. De quoi lever les dernières réticences du masqué, d'autant plus que Michel Ocelot agrémente sa visite d'une kyrielle de visages connus animant l'éventail et le monopole culturel de la cité.


Dilili à Paris ravira donc à coup sûr le parent qui accompagnera sa progéniture dans la salle, le critique qui ne manquera pas de faire étalage des figures qu'il a reconnues ou celui qui voudra briller un peu en société. Sauf qu'il n'est pas interdit de se poser la question de savoir si un tel positionnement sera à même de satisfaire nos charmantes petites têtes blondes. D'autant plus que si le graphisme si particulier d'Ocelot est encore une fois au rendez-vous, convoquant l'enluminure, les couleurs franches et riches ou de magnifiques costumes, le message du réalisateur est délivré d'une drôle de manière.


En effet, Dilili aborde, avec la malice de ses grands yeux d'enfant, le thème à la mode de la place de la femme dans la société. Mais aussi, parfois, de manière très didactique. Le tout dans une atmosphère étrange, entre le noir et l'anxiogène, une fois les égouts de Paris visités. Avilies, anonymisées, réduites à marcher à quatre pattes comme des animaux, Michel Ocelot développe son discours avec un sérieux et un premier degré qu'on ne lui connaissait pas, heureusement atténués par un final féérique et enlevé.


Largement de quoi faire oublier, en tous cas, quelques maladresses et longueurs qui ne terniront pas l'appréciation plus que positive de ce Dilili à Paris, par ailleurs rayonnant, sincère et attachant, comme sa petite héroïne.


Et dire que le masqué a failli passer à côté...


Behind_the_Mask, Paris a tout pris.

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le 13 oct. 2018

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