Banlieue-land
Le cinéma français contemporain, d’Audiard (Dheepan) à Sciamma (Bandes de Filles), tente de construire un regard sur la banlieue. Il cherche à s’accaparer cet univers qui, pour beaucoup, à commencer...
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le 30 août 2016
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Difficile de juger un tel film qui part un peu dans tout les sens, c'est maladroit, excessif, outrancier, critiquable, certes. En tout cas, ce qui est sure c'est que, au vu des critiques, le film ne laisse pas indifférent et a au moins ce mérite la.
Perso je préfère relever l'énergie, la vitalité, la rage, et la radicalité qui s'exprime dans ce film, au travers de son personnage principale.
Le film est souvent présenté comme une version féminine, voir même "trop" féministes", des deux surestimés "La haine" ou encore "Scarface". Mouais bon, pourquoi pas, la misandrie excessive et supposé du film ne m'a pas dérangé plus que cela. Pour une fois que les rôles sont inversés, ce n'est pas si dramatique que cela. Je trouve le parallèle avec le film de Sciamma "Bandes de filles" plus significatif et plus judicieux, voir même "Fish Tank" d'andréa Arnold. Divines étant une version plus vitaminé, rentre dedans, et émotionnellement plus explosive que le film de Sciamma, qui lui est beaucoup plus subtil et doux.
On pourrait penser à un énième film de banlieue, mais je trouve que cette classification est un peu trop simpliste et réductrice. Certes le cadre où évolue les personnages est la banlieue et met en scène une réalité sociale difficile mais je trouve que le film est plus que cela.
C'est aussi une profonde et belle histoire d'amitié entre deux amies qui se soutiennent et se portent mutuellement (au sens propre comme au sens figuré) et qui restera indéfectible jusqu’à la mort;
une histoire de filiation et de reconnaissance sociale, où la relation mère/fille est pour le moins difficile et défaillante mais pas dénué d'amour;
une histoire décrivant la difficulté de se construire pour une jeune fille dans ce monde là, où les seuls modèles de réussite sont une dealeuse qui va mettre des billets dans des strings de putes thaïlandaises et qui se vante de ses exploits devant les yeux de jeunes hommes surexcités, où les hommes se déguisent en travestis pour pouvoir subvenir maigrement aux besoins de la famille, Où les caïds de la cité ne font plus de différences entre un homme et une (très jeune) femme, et n'hésitent plus à les frapper et à les violenter sans état d'âmes.
L'héroïne va aussi faire face à la découverte de sentiments nouveaux pour elle, et peut être tout aussi violents et contradictoires, la naissance d'une féminité et d'une sexualité, la découverte de sentiments amoureux, ou encore la découverte d'un intérêt refoulé pour l'art (en l'occurrence la danse).
Ce film peut aussi être vu comme une quête initiatique, une transformation, un passage douloureux de l'enfance à l'âge adulte, certes violente et difficile, mais les transformations se font souvent dans la douleur et rarement de manière linéaire et calme. Une forme d'accouchement où l'héroïne est rattrapée par la dure réalité de la vie, elle va devoir se confronter à la violence du monde réel, et va devoir abandonner ses rêves enfantins de gloire et d'argent facile, money, money, money, tout ça va très rapidement partir en fumée.
Le personnage du danseur (même si j'ai trouvé sa relation avec l'héroïne complètement raté et très peu crédible) vient incarner la possibilité d'une autre voie pour le "jeune de banlieue". Il vient s'opposer au personnage principal (qui rêve de gloire, de paillettes, d'argent facile) et va, à force de travail et de sueur, sans tenir compte des moqueries et des brimades de son environnement, à force de persévérance, réussir à s'extirper de sa condition, et par la même ébranlé le concept de "déterminisme sociale" qui était violemment utilisé par l'héroïne dans sa scène choquante avec la prof pour pouvoir céder à la facilité et satisfaire, sa sinistre et puérile ambition, son besoin de reconnaissance et de réussite.
Parce que, à mon sens, la question du choix est déterminante dans ce film. J'ai été déçu par la scène de confrontation finale entre les forces de l'ordre et les jeunes de cités, parce qu'elle est ambigüe et laisse place a beaucoup d'interprétations possibles. Je ne crois pas (enfin j'espère) que la réalisatrice est voulu présenter une fois de plus, ces jeunes comme étant des victimes de la société, mais plus matérialiser une impression d'abandon et d'indifférence de la société vis à vis de leur souffrance. Il m'a semblé que le pompier était tout autant affecté par le fait de ne pas pouvoir intervenir, mais que cela était la conséquence, et la faute de ces mêmes jeunes de banlieues qui empêchaient initialement les pompiers de rentrer dans la cité.
Et pour en revenir à cette question de choix déterminant, je pense que si l'héroïne en est arrivé là c'est uniquement dût à ses propres choix, dictés par la facilité, par sa propre bêtise, son immaturité, par son ambition dévorante et par ses rêves futiles, par son besoin de reconnaissance, par son besoin de réussir là, où sa mère a échoué, afin de laver l'affront et la honte subit tout au long de ses jeunes années, elle la bâtarde. Et non à cause de la société. Elle aurait put choisir de prendre la main qui lui était tendu par la prof (chose que le danseur a fait en choisissant de continuer à travailler avec ses professeurs même si c'était difficile) ; elle aurait put choisir de se rendre au spectacle de danse, plutôt de courir après l'argent, elle aurait put choisir de rejoindre le danseur sur le quai de gare et laisser parler son petit cœur de jeune fille en fleur. Non elle aura fait constamment les mauvais choix. C'est sûr elle aura réussit, elle l'aura eut son bain de money, money, money, mais cela lui aura couté très très chère au final, et pour quoi? pour des bouts de papiers calcinés qui parte en fumée.
A noter aussi les prestations de Deborah Lukumuena et surtout Oulaya Hamamra, qui peut passer d'une vraie tête à claque (scène avec la prof), à une jeune lolita, bimbo, en quête de gloire, d'argent facile et de reconnaissance; d'une vulgaire petite caïd de cité, à une jeune adolescente qui se confronte à des émotions amoureuses nouvelles pour elle.
Le film n'est pas parfait et surement discutable sur bien des aspects, la scène de la Ferrari est pour moi complètement ratée, voir même gênante. Il y a beaucoup de clichés, la relation amoureuse est très peu crédible et ne fonctionne pas, la barque sociale est quand même chargé, mais j'ai aimé l'énergie, l'émotion brute du film des personnages et des acteurs.
En plus je tiens à préciser que je ne suis pas du tout un défenseur ou un fan d'Houda Benyamina, bien au contraire, j'ai trouvé son intervention au festival de Cannes complètement déplacée, vulgaire et ridicule, mais que des fois des personnages excessifs, entiers et radicales et ben c'est quand même rafraichissant, surtout dans un entre-soi du cinéma français, quelquefois bien lisse, sans grand saveur, et souvent formaté dans un même moule.
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Créée
le 17 janv. 2017
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