Django est déchainé et on aime ça !
En grand amoureux du cinéma qu'il est, Quentin Tarantino n'avait pas encore eu l'occasion de s'attaquer au western-spaghetti, genre qu'il affectionne pourtant particulièrement. C'est donc avec son huitième film (si on oublie My Best Friend's Birthday qui est inachevé, Sin City ou Groom Service pour lequel il n'a pas réalisé seul ou seulement une séquence) qu'il pose sa caméra sur un genre qui a eu ses nombreuses heures de gloire avant de devenir, malheureusement, has-been.
Django Unchained n'est pas un western-spaghetti proprement dit tant il n'utilise pas vraiment les codes du genre hormis peut-être celui du justicier vengeur. C'est avant tout un hommage au genre et une nouvelle occasion pour QT d'utiliser des bandes-sons de Bacalov ou Morricone. Ca s'arrête plus ou moins là. Tarantino use pour son film de personnages caricaturaux et surtout d'un humour au second degré généralement constamment présent.
La première heure du film s'apparente pour moi au chef-d'oeuvre tant tout me semble très maitrisé. La première séquence est l'une des meilleures introductions de l'année avec la découverte des deux personnages, le générique en hommage au genre du western spaghetti et surtout une tension qui va croissant, King Schultz et ces gestes très maniérés et Django, enchaîné qui va retrouver petit à petit sa liberté.
En situant son conflit deux ans avant la guerre de Sécession, Tarantino démontre qu'à travers le personnage Django, c'est bientôt tout un monde qui va s'écrouler dans le Sud des Etats-Unis. A cette époque et depuis de nombreuses années, les Noirs sont libres dans les états de la future Union, là où le Sud se montre très conservateur. Tarantino use de quelques séquences très symboliques, comme Django qui passe devant une potence et dont la tête rentre dans le trou de la corde ou encore de ce sang qui macule les champs de coton et dont la signification est d'une évidence absolue, mais dont la lecture peut se faire double: c'est bien par la traite des Noirs pour les champs de coton que viendra le déchirement et l'horreur de la guerre civile qui fera des centaines de milliers de morts et bien entendu que ce coton est récolté par le sang des Noirs.
La seconde partie du film reste tout aussi maitrisée mais ne manque par contre pas de longueurs par moment. Je trouve que la séquence du diner aurait pu être un peu moins longue, par exemple.
Par contre, je trouve que le film use de personnages caricaturaux d'une belle manière. Cette oeuvre est un peu une grande farce pour dénoncer l'esclavagisme. Les Blancs sont montrés de manière caricaturales parce qu'ils se prennent pour des êtres supérieurs mais la plupart ont des dents salement amochées, ne savent pas parler correctement et sont limites proches de la consanguinité pour certains. Les Noirs ne sont pas en reste puisque Tarantino appuie sur la manque d'éducation due à la condition de ce peuple. Leur bêtise parait parfois très exagérée avec le personnage de la jeune femme qui fait visiter la ferme à Django comme exemple. Ce dernier et Schulz sont les contre-poids de cet univers.
Tarantino s'offre aussi par moments quelques plans à la photographie très réussie. Le casting est impeccable avec un Foxx convaincant dans ce rôle de noir émancipé, un Christoph Waltz qui mange comme d'habitude l'écran et qui nous offre une prestation parfaite. Di Caprio ne manque nullement de répondant et les dialogues entre les deux hommes sont souvent savoureux à regarder. Et que dire de Samuel L. Jackson, presque méconnaissable, dans le rôle de l'intendant noir.
Quentin Tarantino s'est donc essayé avec succès au western. Et il a tellement apprécié qu'il a déjà annoncé que son prochain film serait de ce genre. Pour les amateurs, on ne peut que sourire.