Quel genre résistera à Tarantino ?
Cela fait quelques jours que je repousse l'écriture de cette critique. Je me suis d'abord dit que je devais absolument revoir Django une deuxième fois pour pouvoir dire quoi que ce soit à propos de ce film. J'irai sans doute le revoir, mais je me lance tout de même, au risque de la recommencer dans quelques jours.
C'est que je suis assez désarmé face à l'ampleur de cette oeuvre, sa longueur, évidemment, mais aussi sa densité qui fait qu'on ne sait pas trop par quelle bout la prendre. Je vais donc opter pour une critique impressioniste, sans chercher la cohérence.
Ce qui frappe d'abord dans Django, c'est la violence. Ce film semble être l'aboutissement d'un processus commencé dans Inglorious Basterds. Tarantino semble être parvenu à une synthèse entre la violence crue, réaliste mais suggérée de Reservoir Dogs (je parle évidemment de la fameuse scène de l'oreille) et la violence sériebéesque de Kill Bill. Sans mauvais jeu de mot, son traitement dans Django m'a désarçonné. Elle penche d'un côté (gerbes de sang, reculs immenses sur les impacts de balles) puis de l'autre (mandigo fighting, scène de curée). Ainsi elle colle parfaitement à la contradiction profonde qui fait la force de ce film : c'est un western spaghetti qui s'ancre dans une réalité historique et dénonce l'esclavage. Je comprends que le Tea Party ait trouvé ce film scandaleux. Merci Tarantino.
Merci aussi de savoir nous surprendre tout en gardant cette patte si particulière. On pourrait d'abord souligner qu'il n'y a qu'une seule scène de dialogue purement comique ("à la Pulp Fiction") dans le film, mais qu'elle constitue à la fois une véritable réussite et une espèce de signature. Ajoutons que Tarantino tend de plus en plus vers l'archaïsme que ce soit dans sa réalisation ou dans sa direction des acteurs mais avec maîtrise et sans que ça devienne un tic. Enfin, pour finir sur les éléments classiques de ses films, il faut souligner que la musique est excellente, les choix éclectiques et qu'on trouve même une ou deux chansons spécialement réalisées pour le film. C'est assez rare pour être signalé.
Enfin, comment ne pas toucher un mot des personnages, tous plus complexes qu'ils n'en ont l'air au premier abord. L'évolution de Django tout au long du film est menée de main de maître. Le Dr Schultz est à la fois charismatique et très humain. Candy, quant à lui, est un méchant certes péteux mais aussi difficile à saisir. Le tout est servi par une interprétation bluffante. Jamie Foxx et Christoph Waltz sont là où on les attends (peut-être un peu au dessus pour Foxx qui ne se contente pas de camper un black-charismatique-badass mais sait donner de la profondeur à son personnage). En revanche, je vous assure que vous n'avez jamais vu Di Caprio ou Samuel L. Jackson comme ça.
Finissons par un poncif : Django est un peu un film somme, une synthèse de l'art de Tarantino. Cependant, je ne me risquerai pas à essayer de le placer dans la hiérarchie de ses films. Allez le voir. Moi en tout cas, j'y retournerai.