Pour le coup, j'avais vraiment envie de voir Doctor Strange in the Multiverse of Madness. C'est peut-être même la première fois que j'avais autant envie de regarder un film du Marvel Cinematic Universe. La raison est très simple et vous la connaissez déjà fort probablement : Sam Raimi. Le gus étant responsable de l'une des meilleures trilogies de superhéros du cinéma, j'avais forcément envie de voir ce qu'il pouvait faire avec cette suite à Doctor Strange. D'un autre côté, le fait qu'il ait mis la réalisation de côté au cours de ces neuf dernières années et le fait que son dernier long-métrage, Le Monde fantastique d'Oz, s'en soit sortit avec des critiques plutôt décevantes, me refroidissait quelque peu. Mais c'est surtout le fait qu'il y ait les producteurs de chez Marvel, notre bon vieux Kevin Feige, qui m'effrayait. Dire que des réalisateurs se sont vus dépossédés de leur travail de la part du studio est un euphémisme tant cela s'est produit à de nombreuses reprises… même si pour le coup, la phase 4 semble laisser plus de libertés aux réalisateurs.
Bref, j'avais beau être à la fois fort enthousiasmé, mais aussi très craintif, j'avais tout de même envie de voir ce film.
Alors ? Ça valait le coup ? Je dirais un petit « oui ». Car si Doctor Strange in the Multiverse of Madness n'arrive pas à se hisser à la cheville de n'importe quel Spider-Man réalisé par notre maître à tous, il se place néanmoins dans le haut du panier des films du MCU.
Là où le film péche le plus, sans trop de surprise, c'est au niveau du scénario. On sent qu'on est dans une saga au format « série télé » et non dans quelque chose de plus intime, de plus personnel. Et c'est donc sur ce point-là que l'on retrouve moins la patte du réalisateur.
Ayant vu WandaVision récemment, j'avais émis l'hypothèse qu'il n'était pas tant que ça nécessaire de visionner la série avant d'entamer le visionnage du film dont il est question ici… et c'est globalement le cas. En fait, par rapport à la série, le film opère une sorte d'entre-deux, reprenant d'une certaine manière les pires choix possibles au niveau du scénario et de la nécessité de visionner WandaVision. D'un côté, on retrouve les enfants qui ont été présentées dans ladite série et dont la recherche est le but primordial de Wanda dans le film… mais de l'autre, le scénario du film ne fait pas tant appel que ça aux éléments-clés de WandaVision. En fait, un personnage aussi important que Vision n'est même pas mentionné. Aussi, bien que le personnage de Wanda a enfin accompli son deuil à la fin de la série, elle sombre dans la schizophrénie avec ce film, n'hésitant alors pas à commettre des massacres afin d'arriver à ses fins. Le film justifie cela par la présence du Darkhold, un livre de sorts de magie noir pouvant corrompre son lecteur, mais n'ayant pas lu les comics, cela résonne bien plus comme une justification facile que comme une vraie raison : pourquoi ne pas avoir bien introduit le grimoire dans la série d'ailleurs ? En fait, entre WandaVision et Doctor Strange in the Multiverse of Madness, il manquerait presque des explications… comme si au moins l'un des deux, la série ou le film, faisait mal son boulot. On en est quasiment au point où il faudrait un nouveau média s'intercalant entre la série et le film afin que le tout devienne vraiment complet.
Outre Wanda et la série qui lui est associée, on a droits à de nombreuses facilités scénaristiques durant les deux heures de film. On sent que le scénario doit avancer pour avancer quitte à devenir un poil ridicule par moment : Wanda qui révèle le nom de Chavez à Strange, Wong qui se fait convaincre bien trop facilement par Wanda de l'aider, Captain Fantastic (présenté comme « l'homme le plus intelligent au monde » ) qui semble tout percuter après quelques minutes de retard quitte à faire tuer par inadvertance ses alliés…
Enfin, film du MCU oblige, on n'oublie pas la fin cliffhanger annonçant la suite, car du moment qu'il y aura du pognon à se faire, rien ne sera jamais terminé.
Ça, c'était pour le scénario, passons maintenant au reste, à des sujets plus intéressants. Niveau visuel, certains effets 3D sont moches et il y a à plusieurs reprises une bouille de pixels affichée à l'écran, mais on a l'habitude avec Marvel. Cela dit, il y a tout de même du bon à noter de ce côté-là, particulièrement la scène dans laquelle le Docteur Strange se transporte accidentellement avec America Chavez à travers le multivers pour la première fois. Autre scène inventive, le combat musical entre Strange et Sinister Strange : quitter à voir de la bouillie de pixel, je préfère que ce soit de cette manière. Quoi qu'il en soit, c'est probablement l'un des films du MCU qui s'en tire le mieux sur le plan visuel et créatif.
Plus surprenant pour du Raimi, certains plans ne sont pas très jolis. Je ne sais pas si cela est dû aux reshoots, mais le chapitre entourant les Illuminati s'en tire beaucoup moins bien que le reste sur ce point-là. N'ayez crainte, on sent tout de même qu'on est dans un film de Sam Rami : on retrouve les gros plans sur la tête des acteurs, son amour pour les surimpressions, son goût pour le vomi (une règle dans son cinéma)… bref, même si on sent moins sa patte que dans un Spider-Man, on sent la présence d'un créatif derrière, et mine de rien, on sent qu'il s'est fait un minimum plaisir en réalisant ce film.
J'ai par contre été très surpris par la « violence » du long-métrage. Ne vous emballez pas, on reste dans un film du MCU, mais j'ai trouvé les morts des Illuminati relativement violentes compte tenu de ce que nous avons eu droit dans la saga jusqu'alors : Black Bolt se pulvérise le crâne après la « suppression » de sa bouche par Wanda, et Captain Fantastic se fait transformer en Ficello (le fromage trop rigolo) avant de se faire exploser la tête.
Bien sûr, on n'oublie pas la présence du pote à Sam Raimi, le génial Bruce Campbell, qui vient ici pour s'autofrapper jusqu'à la dernière scène post-crédit. Au niveau de l'humour d'ailleurs, on a beaucoup moins de blagues servantes à dédramatiser l'action : ENFIN ! (au cas où vous ne l'auriez pas compris, j'aimerais bien que cela continue) On retrouve aussi Danny Elfman à la composition… mais pour le coup ses musiques ne m'ont absolument pas marquées : elles se révèlent beaucoup trop discrètes. Bon après, j'ai l'impression qu'il n'a réussi une seule B.O. depuis plus de 10 ans.
Bref, Doctor Strange in the Multiverse of Madness s'en tire plutôt bien. En fait, il s'en tire même très bien face aux précédents films du MCU. En tous cas, la dernière fois que j'ai vu un film de la saga pouvant se placer sensiblement au même niveau, c'était en 2017 avec Thor Ragnarok. Comme quoi, on a bouffé pas mal de merdes entre-temps.
Pas un film mémorable en somme… m'enfin, peut-être que cela redonnera envie à Sam Raimi de réaliser des films. Et ça pour le coup, ce serait vraiment génial !