Après avoir fait ses premiers pas à travers le jeu vidéo ainsi que la série télévisée en adaptant leur propre jeu Wakfu en série de 2 saisons (3 avec celle diffusée cette année), le studio Ankama tente en 2016 de franchir un nouveau cap en livrant leur tout premier long-métrage d’animation centré sur l’univers de leurs jeux et séries avec un spin-off dédié à l’un des personnages les plus appréciés de l’univers du Krosmoz.
Wakfu, sans trop en dire, c’est une forme de petit miracle dans l’horizon des dessins animés français moderne et un plat de résistance en animation que je compte bien consommer avec les secondes et troisièmes saison. Très influencé par la culture manga tout en croisant une histoire digne d’un bon RPG vidéoludique et son groupe de héros auquel s’attacher, l’animé a trouvé une identité rapidement en plus d’un public mais la série semble visiblement grandir et mûrir avec ses spectateurs au fil des épisodes.
Le projet de film sur l’univers du Krosmoz remontait déjà à 2014 quand un film sur l’univers de Wakfu était en cours, jusqu’à ce que le réalisateur de la série avoue qu’un film sur l’univers dépendrait du succès de la troisième saison. Et enfin, entre-temps, il y a quand même eu des événements de la part du studio Ankama pour faire la promotion sur un autre film sur l’univers qui serait centré sur un des personnages du Krosmoz ayant fait son apparition en fin de première saison de Wakfu, Joris de Bonta.
Donc : sachant que les jeux vidéos au cinéma font très rarement bon ménage et que 2016 ne s’en est pas privé pour nous le rappeler cruellement à 4 reprises, en est-il autrement pour Dofus, chapitre 1 : Julith des studios Ankama ?
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Bonne nouvelle : la réponse est oui, sans mal et je pense qu’un néophyte à l’univers Krosmoz peut passer un bon moment. Mauvaise nouvelle : on ne tient pas pour autant le miracle qui brisera la malédiction pour de bon.
Déjà on peut reconnaître à Dofus sa principale qualité : Joris Jorgen et son antagoniste Julith sont tout deux les principales réussites de ce premier film d’Ankama. Le premier étant un héros suffisamment attachant et bien écrit pour qu’on le soutienne, et la seconde Julith échappe à tout manichéisme tout comme Nox de la série Wakfu évitait de tomber dans un archétype trop simplifié. Dofus tient beaucoup grâce au parcours suivi par chacun et au lien qu’il les unissent, en particulier Joris en bon passionné de boufbowl qu’il est et ses origines ainsi que son parcours étant crédible en plus des responsabilités qui pèseront sur lui.
Pour le reste des protagonistes : on a à boire et à manger. Si l’entourage de Joris constitué de Lilotte et Kerubim Crépin est en somme fort sympathique, de même pour Bakara la sœur de l’huppermage Jahash, Atcham fait un second couteau finalement ridicule et dont le motif de haine qu’il éprouve envers Kerubim est complètement débile (même pour un film d’animation influencé par la culture manga) et j’ose à peine parler en détail du champion de boufbowl Khan-Karkass qui constitue une des plus grosses tâches de Dofus et un comique relief tellement énervant voire gênant et imbus de lui-même qu’il aurait eu sa place dans un Transformers de Michael Bay ou dans une mauvaise production Hollywoodienne moderne. Chaque fois qu’il l’ouvre, c’est pour son propre compte personnel et ne sera motivé que par l’idée d’emballer Bakara dés que l’occasion se présentera, quand ça n'est pas ses parties génitales mise en valeur le temps d'un plan.
Pire encore, Karkass est l’un des principaux facteurs qui gâchent le climax du film et le ton sérieux de ses enjeux. Les enjeux autour des Dofus Ebène et Ivoire de Brackmar et Bonta sont présent mais contrairement à l’animé Wakfu, l’humour de Dofus est bien loin de convaincre et tombe dans un bon nombre de gags visuels assez vulgaire et même déplacé selon le contexte (Bakara en mode picoleuse de première et la sous-intrigue inintéressante de Khan Karkass au stade étant ce qu’il y a de plus handicapant dans le final). L’émotion a donc beaucoup de mal à intervenir au moment opportun. Surtout pour un film d'animation dont les thématiques poursuivent ceux déjà exploré par Wakfu, celle de la famille.
Tout le contraire du premier tiers du film qui constitue sans mal la partie la plus maîtrisée avec son installation sur l’origine des deux Dofus et quelques rares clins d’œil de l’univers du Krosmoz qui feront sans mal plaisir aux fans (le Shushu de la boutique de Kérubim qui fait penser à Rubilax par exemple), ça prend son temps pour faire découvrir Joris et sa famille recomposé et on se sent investi lorsqu’une menace ou un malheur intervient sur notre groupe. Et surtout, seul point que lequel je n’ai rien à redire tout au long du film : visuellement parlant, c’est un sans faute !
Les mouvements des personnages sont beaucoup plus fluides et souple que ceux de Wakfu ou les déplacements et mouvements étaient plus saccadés, les plans sur la cité de Bonta comme sur la dimension Ekaflip sont profonds et mêmes créatifs (le jeu piégé du temple de Kérubim), l’éclairage est maîtrisé en tout lieu tout temps et les combats ont de la gueule et du dynamisme à revendre. Bien soutenue par l’accompagnement musical de Guillaume Houzé, en soit dynamique et très efficace lorsqu’il le faut. Là non plus je n’ai pas grand reproche à faire.
Et un dernier petit mot sur le doublage français qui ne repose jamais sur la présence de célébrité à l'univers de beaucoup de grosse productions. Jean Claude-Donda, Emmanuel Gradi, Elisabeth Ventura, Bernard Alane ou encore Patrick Poivey, ça me fera toujours du bien d'entendre toutes ces belles voix au doublage et de savoir qu'on a un film qui ne tente pas de se reposer ou de se vendre sur la présence de star.
Au final, je ne serais pas étonné que l’équipe du film ait été partagé pour trouver une ambiance adéquate à un film qui devait s’adresser à un plus large public qu’une série destinée à être exploité à la télévision. Et d’ailleurs, pas de chance : ça a fait un bon gros bide à sa sortie (et visiblement les gens ont préféré rentabiliser un film de super-héros avec des blagues grasses et envahissante sortie à la même période).
Mais qu’importe : le potentiel se voit et en principe je retiens davantage le positif que les quelques clichés qu’on peut y trouver ou l’humour peu réussi. Je ne sais pas si il y avait suffisamment de matière à faire une suite (qui ne verra pas jour de si tôt), mais au moins les origines de Joris sont réussies, l’ensemble se suit assez agréablement et de toute manière, selon moi tout film d’animation en 2D de nos jours un tant soit peu honnête comme ici méritent d’être défendu. A tenter au moins une fois si on est néophyte, à découvrir en tant que fan des productions animé d’Ankama !