Echec et meute
L'être humain est, avant toute autre chose, un animal social. Mais comme il aime plus que tout se raconter de réconfortants mensonges, il fait tout ce qui est son pouvoir pour l'oublier, et feint de...
Par
le 22 nov. 2018
54 j'aime
10
Outre le jeu bluffant de Marcello Fonte salué par toute la critique, relevons la qualité du scénario de Garrone qui se déroule progressivement jusqu'à une inévitable fin ainsi que l'humilité (retrouvée) du point de vue avec lequel le cinéaste regarde ses personnages et les faits qui leur arrive.
Commençons donc par Marcello. L'exploration de la part de Garrone de sa psychologie, plus nuancée et profonde qu'il ne le paraît, le présentant à la fois comme touchant, profondément humain quoique à la vengeance implacable, innocent quoique malin et fourbe va de pair avec sa prestation justement et unanimement applaudie par la critique et le jury cannois, Fonte réussissant à atteindre un niveau d'honnêteté scénique remarquable (un détail - assez futile certes, mais représentatif du minutieux travail d'acteur - certainement passé inaperçu aux yeux de beaucoup a retenu notre attention: quand Marcello veut se cacher de son bourreau d'ami après lui avoir salement massacré la moto, il rentre dans sa piteuse boutique en baissant le rideau métallique comme s'il avait répété ce geste toute sa vie, comme s'il y avait réellement travaillé des années durant, tant son geste est naturel).
De plus, le scénario jouit d'une bonne construction, l'histoire de la relation de dominé/dominant (sorte de duo de cirque aux accents dramatiques, à la fois drôle et pathétique) entre deux «amis» d'enfance se mettant peu à peu en place, avant de s'élancer follement sans jamais savoir comment s'arrêter - car il faut en effet bien reconnaître malgré tout que la fin peine à se mettre en place et n'est pas si bien introduite.
Enfin réjouissons-nous de constater que Garrone prend beaucoup moins de haut ses personnages que dans Reality ou Tales of Tales. Au contraire il les considère à dimension humaine, grâce entre autres à l'équilibre trouvé entre les forces du trop bon Marcello et de l'impayable brute Simoncino. Par ailleurs, ses prises de vue d'une banlieue napolitaine, cité balnéaire vide, sans humanité, dégradée, méprisée par la nature et l'homme établissent un cadre parfait au ton du film.
Une histoire prenante, inspirée d'un fait divers grotesque et cruel, remarquablement bien racontée, avec une galerie de personnages admirables dans une Italie abandonnée et sauvage, où la loi du plus fort règne sur celle du plus faible, non sans rappeler l'intimidante mafia et l'impuissance du peuple.
7,5/10
Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à sa liste Les meilleurs films de 2018
Créée
le 22 oct. 2018
Critique lue 201 fois
1 j'aime
D'autres avis sur Dogman
L'être humain est, avant toute autre chose, un animal social. Mais comme il aime plus que tout se raconter de réconfortants mensonges, il fait tout ce qui est son pouvoir pour l'oublier, et feint de...
Par
le 22 nov. 2018
54 j'aime
10
On ne peut pas le nier, depuis quelques années et malgré de nombreux prix et nominations, le cinéma italien se fait discret. Pourtant, je pense que le talent est toujours bien présent mais celui-ci...
Par
le 8 janv. 2019
37 j'aime
38
Un prologue en trompe-l’œil. Avec en gros plan, puis en très gros plan, la tête énorme et blanche d’un molosse, la gueule ouverte, des crocs terrifiants – et la peur qui va glacer le spectateur,...
Par
le 1 août 2018
36 j'aime
17
Du même critique
Reconnaissons d'abord le mérite de Luca Guadagnino qui réussit à créer une ambiance - ce qui n'est pas aussi aisé qu'il ne le paraît - faite de nonchalance estivale, de moiteur sensuelle des corps et...
Par
le 17 janv. 2018
30 j'aime
1
Comédie romantique de ciné indé, au ton décalé, assez girly, un peu cheesy, pour grands enfants plutôt que pour adultes, bien américaine, séduisante grâce à ses acteurs (Saoirse Ronan est très...
Par
le 18 janv. 2018
26 j'aime
2
Pedro Costa soulève l'éternel débat artistique opposant les précurseurs de la forme pure, esthètes radicaux comme purent l'être à titre d'exemple Mallarmé en poésie, Mondrian en peinture, Schönberg...
Par
le 25 mars 2020
11 j'aime
11