Erigé au panthéon du cinéma d’horreur dès son premier essai, Stuart Gordon se voit naturellement confier la réalisation de From Beyond, une nouvelle adaptation lovecraftienne de Empire Pictures mais devra auparavant s’acquitter d’un autre projet tourné parallèlement dans un décor mitoyen des studio Dinocita afin d’économiser sur les frais de production. Dolls naît d’un simple visuel promotionnel destiné à assurer les préventes à l’étranger et pour lequel Ed Naha journaliste chez Fangoria sera missionné d’écrire le scénario comme il l’avait auparavant fait pour Troll, autre succès de la firme en VHS. Comme souvent son producteur Charles Band s’emballe et demande à ce que son film de poupées tueuses soit aussi agressif et gore que Reanimator tandis que son réalisateur souhaite aborder son film comme un conte macabre d’avantage accès sur l’ambiance que sur ses effets chocs. Les deux parties parviennent finalement à un compromis pour livrer ce qui est encore aujourd’hui comme l’un des sommets du genre.
Sur la route des vacances, la famille Bower se retrouve embourbée suite à un violent orage et trouve refuge dans un vieux manoir isolé. Ils sont accueillis par les Hartwick, un couple de collectionneur chaleureux qui leur offre le gîte et le repas. Le décor est d’un autre temps, les murs sont décrépits, et les pièces de vie sont envahis de poupées semblant dévisager les visiteurs qui seront bientôt rejoins par deux pétasses chapardeuses en constante rébellion, ainsi que par un homme plus avenant souffrant de toute évidence du syndrome de Peter Pan. Non content de jouir de l’hospitalité de leurs hôtes, les invités les plus malveillants se verront sévèrement châtiés par les jouets possédés de la maison. Et pour qui a déjà rêvé voir ses parents se faire dévorer par un ours en peluche géant après avoir été puni ou bien de voir ses petits soldats tirés sur les gens, et bien c’est pure fantaisie. N’allez pas pour autant conclure que Dolls est une comédie horrifique, même s’il sait parfois distiller une bonne dose d’humour noir dans ses mises à morts, il y a quand même de quoi développer une pédiophobie face à ces gros contingents de jouets déchaînés et animés en stop motion par David Allen.
Imaginez un instant vous retrouver encerclés de tous les côtés par des poupées hargneuses armés de marteaux et de ciseaux, qui vont jusqu’à vous couper les pieds avec une scie, ou bien à vous ronger le sang avec leurs dents et revenez me dire après que vous vous sentez de taille à tous les affronter en tenue de pyjama. Finalement le film est non seulement un cauchemar pour les plus jeunes, mais également pour les adultes ayant conserver leur âme d’enfant d’autant qu’il invite le spectateur à mettre de côté son scepticisme et de croire en l’imaginaire et au fantastique. La fin constitue d’ailleurs une chouette morale digne des contes européens, puisque seuls ceux qui ont su préserver leur innocence seront épargnés. Une suite fût à l’époque envisagé mais c’est finalement sous d’autres franchises que son producteur continuera d’exercer son fétichisme exacerbé pour les poupées avec une flopée de succédanés mais surtout avec la saga Puppet Master qui emprunte le même acteur (Guy Rolfe) dans le rôle de l’enchanteur André Toulon. Comme quoi, on est jamais trop vieux pour jouer avec des poupées, fussent-elles de porcelaine ou bien de chaire et de sang…
Le sage pointe la lune, l’idiot regarde le doigt. Alors s’il te faut un guide pour parcourir l’univers étendu de la Full Moon Features, L’Écran Barge te fera découvrir le moins pire et le meilleur de l'oncle Charles Band, le Walt Disney de la série bis !