D'abord, il y a l'insupportable nonchalance de JP Léaud, aussi doué pour prendre une intonation qu'un chat pour aboyer.
Je ne parle pas de la petite vie tranquille des nouveaux mariés, qui semblent ignorer toute forme de contingence matérielle. L'amour censé unir les époux sonne faux, de même que le théâtre des voisins qui vont et viennent, et l'on s'ennuie presqu'autant que Doisnel.
Mais... il y a Claude Jade, exquise oie blanche confite dans le confort petit-bourgeois, qui oppose ses irréductibles principes à la bohème virevoltante de son mari. Et puis aussi le parfum révolu du début des années 70, où l'on fumait allègrement au bureau et dans la chambre de bébé, où l'on découpait les pages des livres, où l'on se retrouvait un job du jour au lendemain, où les putes avaient de la conversation et où les potes pouvaient vous taper mille balles avec le sourire.
Bref, si le film agace d'abord, le côté mélancolique de l'atmosphère ne tarde pas à diffuser une étrange hypnose, et l'on se laisse porter par la petite musique de la vie conjugale, avec ses impasses et ses portes dérobées. Il y a un peu de Georges Pérec dans ce ton à la fois tendre et désenchanté, comme si Truffaut laissait avec bienveillance ses tourtereaux commettre les erreurs de leur génération. On sent bien que cette vie conjugale-là est vue à travers une lentille déformante, mais le film parle finalement d'un couple ordinaire, qui a toutes les chances de réussir - ou d'échouer. Et à la longue, on finit même par apprécier la désinvolture du héros, qui survole son époque en y laissant quelques plumes... qu'il s'arrangera sans doute pour tremper dans l'encre!
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