Les éditions Montparnasse ont l’audace téméraire de ressortir ce bide vingt ans après sa sortie, avec Emmanuelle Béart accaparant tout le visuel laissant Don Juan minuscule, face à elle gigantesque, comme si de sa majestueuse robe jaune, elle l’arrêtait dans sa chevauchée endiablée. Affiche déstabilisante et malheureusement mensongère d’une part car l’on ne verra rien d’un renversement des rôles dans le film (Don Juan et Sganarelle sont de chaque plan et répliques ou presque) et l’on ne verra pas non plus Emmanuelle Béart, sinon deux minutes au début, puis cinq minutes à la fin, bref pas de quoi la statufier sur un visuel. Jacques Weber campe lui Don Juan, chevelure poivre et sel, buste bombé, pectoral poilu virevoltant à travers le décolleté de sa chemise. Il est vieillissant, tousse beaucoup, plus pathétique qu’enviable à priori et pourtant, les femmes le séduisent, le désirent. La dernière fois que j’ai lu Don Juan, je devais être en sixième si mes souvenirs ne me trahissent pas, donc ces souvenirs, très maigres, m’empêchent d’apprécier certains parti pris : Construction différente des actes, des scènes, répliques raccourcies, personnages secondaires nouveaux, quand d’autres disparaissent. Qu’importe, le problème est ailleurs : C’est globalement chiant. Sinon une direction artistique parfois intéressante et de jolis costumes, il y a certains choix de plans très bizarres, une utilisation musicale ridicule, une interprétation hasardeuse – Boujenah, au secours. Difficile d’y trouver son compte. Et de savoir ce qui a tant plu à Weber pour se tourner en ridicule de la sorte. Et puis l’humilité du truc fait naître de beaux frissons de la honte, notamment à la fin lorsqu’un personnage dit « Mais où vont-ils aller, maintenant ? » comme si quelque part, Weber se demandait ce que deviendrait le cinéma après son passage, quelle trace y laisserait-il. Le gars est persuadé de faire mieux que Molière, de faire un truc post moderne, expérimental, c’est super gênant.