On entend souvent dire – dans les médias, dans les conseils de classe – que le niveau intellectuel des enfants et des adolescents ne cesse de chuter. Que d’année en année s’appauvrit une culture, s’éteint une curiosité, se sclérose une créativité. Ne pas chercher plus loin que ce Dora et la Cité perdue, condensé de tout ce que le divertissement pour les jeunes fait de plus idiot et de plus laid.
Car on ne sait véritablement ce qui agace : ou le personnage de Dora, hyperactif et insupportable dont la morale prêchi-prêcha « je dois être qui je suis » entache le film d’un salmigondis de mauvais sucres, ou la caractérisation prototypique des autres protagonistes qui jalonnent son parcours – le geek scientifique, l’ami ténébreux, l’intello méprisante –, ou l’écriture d’un scénario qui accumule les lieux communs et empêche la surprise, ou la mise en œuvre de ce dernier, laborieux assemblage de scènes mal fichues aux effets visuels dégoûtants (les enfants vont prendre peur à n’en pas douter) et à la réalisation digne d’un téléfilm du samedi après-midi, en semaine. On avait déjà dû subir le travail de sagouin que James Bobin avait infligé à la suite d’Alice au Pays des merveilles version Tim Burton ; or, le metteur en scène trouve ici un sujet à sa valeur véritable, soit peau de balle.
Ce n’est pas parce qu’un film s’adresse en priorité aux enfants qu’il doit prendre ces derniers pour des imbéciles ; alors on rétorquera que la série animée n’était pas non plus de l’intelligence la plus probante, oui d’accord. Dans ce cas, à quoi bon adapter Dora au cinéma, et infliger une telle tambouille à un spectateur certainement accompagné par sa famille – la tambouille se partage, c’est là son but – ? Car personne ne mérite Dora et la Cité perdue. Si vous aimez l’aventure, regardez Indiana Jones. Si vous aimez voir des enfants partir en expédition, regardez Les Goonies. Si vous soutenez qu’une héroïne gagne le devant de la scène accompagnée d’un renard, regardez Zootopie. Tout mais pas ça : c’est nul.