Si on met de côté l'introduction du film très abrupte (au point qu'on se demande s'il ne manque pas une bobine), c'est une savoureuse comédie romantique que voila. Le sujet n'est pas inédit ni toujours original dans son déroulement mais le film regorge de trouvailles. Elles sont d'abord visuelles avec ce style si particulier du cinéaste, rempli de décadrages, d'ombres expressionnistes, de diagonales sabrant l'image et de compositions de plans audacieuses. Tout cela est assez rare dans une comédie légère et c'est parfois un exercice de style qui fait office de cache-misère. Par contre, quand le scénario aborde des séquences plus amères ou mélancoliques, l'effet est remarquable comme dans le cabaret sordide où joue un pianiste handicapé. Le film y gagne une certaine poésie qui fonctionne aussi très bien dans des moments plus gracieux comme l’irrésistible jeux de séduction avec le cambrioleur qui déborde d'idées délicieuses et de dialogues savoureux. L'humour est d'ailleurs parfois proche du surréalisme ou du non-sens, et même de l'anarchisme, grâce à quelques seconds rôles comme l'employé des docks philosophant sur la vie et le travail (les bidons) ou le policier.
La verve et la fantaisie font largement oublié une construction proche d'un film à sketch et quelques passages moins inspirés.
Espérons que les louanges de Tavernier sur Gréville donne davantage d'idées aux éditeurs. Ce Dorothée cherche l'amour découvert à la cinémathèque a l'air extrêmement rare à ce titre.