Druk ou l’art de mêler le fantasme à la réalité.

L’événement cinématographique de l’année 2020 est Danois. Druk traduit en Français “beuveries” réalisé par Thomas Vinterberg, dépeint l’histoire de 4 hommes, professeurs dans un lycée, qui décident un jour de mettre en application la théorie d’un psychologue norvégien : l’homme aurait dès la naissance un déficit d’alcool dans le sang. En compétition officielle à Canne, Druk est un film poignant avec pour tête d’affiche un acteur déjà bien connu du grand écran: Mads Dittman Mikkelsen (Casino royal, Hannibal ..) Une nomination qui est pleinement méritée au vu de ses 115 minutes de leçon de vie.


Lorsque je me suis rendue à la séance pour voir ce film, je dois avouer que je ne m’attendais à rien. J’avais plutôt l’intuition que j’allais encore voir un film surcoté ou je ne comprendrais pas grand chose. Mais non, je me suis pris une claque, une vraie, une qui n’arrive qu’une fois de temps, pas celle que l’on a en regardant un tarantino ou un spielberg. Ce film a réussi l’exploit de donner à mon cerveau deux sensations contradictoires : le fantasme, puis ensuite une prise de conscience de la réalité. Les 4 hommes quinquagénaires qui mènent cette expérience nous les connaissons tous : le père de famille, l’homme seul depuis bien trop longtemps, celui qui a délaissé les siens et ses rêves depuis un moment. Ces personnages, tous différents, mais amis, qui décident de mener une expérience au nom de la science pour pousser leurs compétences au maximum.


Être la meilleure version de soi-même, voilà une chose dont nous avons tous déjà rêvé un jour. Si l’on suit la théorie exposée dans le film alors réussir à atteindre notre idéal n’est finalement pas si compliqué. Nous sommes, pour être plus précis, à 0,5% de cet objectif. Ce chiffre n’est pas anodin, il représente le déficit quotidien de notre corps en alcool pour exploiter nos capacités à leur maximum. Ce chiffre est l’équivalent de deux verres de vin en continu dans notre corps. Vous pouvez déjà commencer à imaginer le tableau et dessiner les divers scénarios qui se profilent à l’horizon. Mais vous auriez tort, Druk n’est pas une énième leçon de morale sur les abus de la boisson bien qu’elle en parle et expose bien évidemment cet aspect dans le film.


Ce qui marque le film est avant tout une mise en scène très intelligente : chaque personnage est mis en valeur avec sa complexité et ses enjeux. Nous pouvons les voir, nous attacher, et comprendre chacun d’entre eux pour vivre avec eux cette expérience. C’est la simplicité et l’envie de captiver le spectateur avec des plans de lecture simple : gros plan, plan large , coupure sur fond noir lorsqu’un personnage reçoit un message, ce qui permet au spectateur de suive et comprendre parfaitement la trame de l’histoire. Par ailleurs, cette simplicité est la bienvenue lorsque comme moi vous ne possédez pas un niveau courant en danois, car ce film est uniquement disponible en VO sous-titré, ce qui ne le sert que d’avantage à mon humble avis. Un autre atout de ce film n’est pas des moindres : la musique qui rythme les scènes de “ beuveries” et donne une gaieté supplémentaire, voire même un aspect épic à certains moments. Je vous promets de ne pas vous “spoiler” mais je peux déjà vous assurer sans trop m’avancer que la bande originale du film Scarlet Pleasure — What A Life sera très présente dans les story instagram cet été pour son air très entraînant qui colle parfaitement avec l’esprit du film.


Une grande partie de cette critique pourrait par ailleurs reposer sur le jeu d’acteur incroyable de tous les personnages principaux, mais vous pourrez voir ici une critique dithyrambique sans aucune once d’objectivité. Il faut donc malheureusement ici que j’aborde les points négatifs de Druk. Le message principal qui est avancé dans ce film est l’idéalisation de la jeunesse et de la liberté qui en découle, ce qui sonne très lointain compte tenu du contexte sanitaire actuel. Ce que l’on peut reprocher à Thomas Vinterberg est son approche nostalgique : on nous parle tout au long de la trame du bon vieux temps, de la meilleure période de leurs vies considérée comme étant la jeunesse. Mais pourtant, les jeunes restent au second plan et sont pratiquement diabolisés tout au long du film. Les jeunes présents durant les 115 minutes que durent la projection sont présentés comme des personnes inconscientes qui pratiquent toutes le “binge drinking” une pratique provenant des Etats Unis ayant pour but de boire de grandes quantités d’alcool dans un laps de temps court avec pour unique objectif atteindre très rapidement un taux d’alcoolémie élevé. La question de la jeunesse idéalisée mais diabolisée, fait résonance cependant à un perpétuel choc des générations qui pensent que celle d’avant était mieux que la suivante , plus sage, intelligente etc… Une théorie qui se remet tout de même en cause à la fin avec une scène de clôture qui met enfin la lumière sur une jeunesse en harmonie avec les personnages principaux.


Si je devais conclure cette critique, par une seule phrase ce serait : courrez voir ce film. Que vous consommiez ou non de l’alcool, Druk est la bouffée d’air frais dont nous avions besoin dans un contexte sanitaire parfois très compliqué. Une ode à la liberté qui nous rappelle de profiter de chaque instant et des personnes qui nous entourent.

NoélieLegrand
10
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le 18 nov. 2021

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Noélie Legrand

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