Parfois, on croit que parce qu'on vit dans une société moderne, on vit de facto dans une société civilisée. On reste droit, sur les routes qui nous sont destinées, sans faire de vague, on dévore les kilomètres de bitume tranquillement, dans notre Plymouth rouge. Mais si cette dite société sait cloisonner les individus à rester droit dans les villes, c'est une autre affaire sur les routes sauvages et désertes, où la primitivité peut vite revenir au galop.
Car un jour, alors qu'on roule au milieu de ce désert, tout déraille en à peine une volée de secondes quand quelqu'un de plus fort que vous débarque sur votre route, et tente de vous en expulser. Les pneus crissent, le diesel brûle... Passée la stupeur de l'instant, la paranoïa et la peur prennent le relais. Pour autant, arrive un moment où il n'y a plus d'échappatoire.
Le Duel peut alors commencer.
Le duel entre Monsieur Tout le Monde et une menace venu d'on ne sait où, à laquelle on ne peut donner un visage et qui reste cloîtré dans sa forteresse d'acier de plusieurs tonnes. On en distingue parfois un bras faisant des gestes moqueurs, parfois une paire de bottes usées à force de taper sur la carlingue.
Spielberg, jeune réalisateur prometteur, met les bouchées doubles dans ce deuxième long métrage, en mettant en scène une traque intense, qui mélange road movie et film d'horreur avec brio. En à peine une heure et demie, deux entités que tout oppose voit la route devenir leur terrain de chasse, et mieux vaut alors ne pas se tenir sur leur chemin.