Alors, comment définir ce nouveau cru de Tom Cruise ? Il s’éloigne radicalement du film auquel tout le monde a pensé au premier abord : Oblivion. Aucun rapport, que ce soit visuel ou dans son sens de l’action, encore moins dans sa trame. Personnellement, j’avais un à-priori bien plus redoutable à en juger par le design des robots et la technique de filmage en caméra à l’épaule : World Invasion. Là encore, on peut se rassurer, ce n’est pas le cas. En fait, concernant la gestion du temps, on est clairement dans le cas d’un Jour sans fin, qui reprend toujours au même endroit quelque soient les actions du personnage. Un choix intéressant, dont on se réjouit à l’avance car il se promet de nous faire revivre à plusieurs reprises le gros débarquement, et donc de nous balancer des scènes d’action à foison. On déchante dès la première boucle. En effet, le problème de cette technique, c’est qu’elle annihile totalement l’impression de danger pour le spectateur. Si il crève, pas grave, on recommence. Dès les 20 premières minutes, les limites du concept sont découvertes, sabordant en partie la caméra à l’épaule immersive, qui à défaut de nous immerger, filme l’action d’une façon plutôt correcte (World invasion était irregardable, ici, on ne rate pas une miette de l’action, ce qui n’était pas gagné au vu de la rapidité des aliens). Comme on ne se sent plus vraiment impliqué (c’est une sorte de sauvegarde automatique de jeu reprenant sans arrêt), on peut toutefois apprécier la vulnérabilité du héros qui doit mourir une bonne soixantaine de fois pendant tout le métrage. Mais reprendre tout à chaque fois, c’est très long… Le film se laisse donc aller à la facilité (obligatoire ?) de faire continuellement des ellipses sous entendant que le héros fait tout pareil jusqu’à en revenir à ce point, ou mieux, qu’il a déjà revécu plusieurs fois la scène avant, et que donc il prévoit tout. Ce parti pris était prévisible, je le comprends tout à fait, mais il n’empêche qu’il est particulièrement facile et qu’il élude l’impact psychologique d’un tel phénomène. Mais on s’en fout de la psychologie, on est là pour l’action ! Je peux comprendre ça aussi, et sur ce niveau, le film ne ralentit pas le rythme. Sur près de deux heures, à quelques temps morts près, on est toujours dans le bain, le scénario est limpide et les enjeux clairs. Enjeux que je ne dévoilerai pas, ils sont purement ludiques et inutiles à l’analyse. En fait, il n’y a qu’une erreur qui m’ait vraiment blasé, les autres pouvant passer pour des partis pris. On peut à la rigueur accepter que Cruise soit envoyé au front sans le moindre motif apparent. Mais quand le film a passé son temps à nous montrer Cruise mourir dès qu’une couille se produisait sur le champ de bataille (il se fait tuer par tout), le voir au cours d’une scène d’action trainer sur le sol par un avion en marche qui explose avant de tomber de 3 étages dans un parking sous-terrain avec des blocs de bétons qui lui tombent dessus, et il se relève en rechargeant son fusil à pompe avec une pauvre égratignure sur le visage, je dis qu’on se fout de la gueule du public. Tom Cruise, on a failli croire que tu étais humain, mais là, ta nature divine ressort d’une façon bien trop évidente. Même quand il est sensé mourir vraiment, il trouve le moyen de revenir… Enfin bon, question action, le film délivre la marchandise, et les designs de ses exo-squelettes (très à la mode ces derniers temps) susciteront l’intérêt du geek comme du fan de SF (la prise en main catastrophique de Cruise lors de son premier jour, notamment). De la technique qui remplit assez bien les vides entre les différents éléments de l’intrigue, qui ne stagne jamais très longtemps sur ses positions et va toujours de l’avant. C’est en tout cas plus marquant qu’Oblivion, et même plutôt amusant quand on se prête au jeu des ellipses et qu’on rit de la dernière mort de Tom Cruise. Sans doute pas le film de l’été, mais un divertissement bien trempé à la hauteur des attentes.