Peu de réalisateurs ont la chance ou la malchance d'être considérés comme des auteurs cultes dès leur première œuvre derrière eux. "Tras el cristal aka prison de cristal, 1987" (dont je vous parlerai bientôt si personne ne se décide à le faire) suffisait à placer dans le Majorquin des espoirs qui ne se sont pas cristallisés dans ses eux films suivants ("El Niño de la Luna" aka "moon child", 1989 et le film d'horreur "99,9", 1997).

Le phare de la confiance s'active à nouveau avec "el mar" un film aux contours irréguliers et aux lignes diffuses qui, précisément pour cette raison, augmentent son intérêt.

"El mar" est une passionnelle histoire d'amitié dans un sanatorium pour jeunes garçons tuberculeux. Violence, volupté, cruauté, sainteté et sacrifice imprègnent l'atmosphère de ce film morbide et sanguinolent où la jeunesse côtoie la mort dans des noces fébriles et mystiques. Pour esprits torturés et baroques comme le mien!

L'œuvre explore les effets de la violence des personnes âgées sur l'esprit et l'âme des mineurs et ses conséquences immédiates, à moyen et long terme. Cela ne s’arrête pas aux analyses psychologiques ou aux explications des chaînes causales. Elle se limite à montrer des faits qui, dans l'esprit du spectateur, sont liés et liés de différentes manières et avec des résultats disparates, voire contradictoires. L'histoire se déroule avec intensité et de manière dérangeante et inquiétante. Il provoque chez le spectateur un flot d’émotions et de sentiments qui se déploient dans une gamme allant de la compassion à l’angoisse.

Ce film impressionne, captive, convainc, perturbe et terrifie par sa férocité environnementale et descriptive.

La mise en scène qui respire l'inquiétude, transcende les thématiques et leur procure un rendu innovant et atypique avec ces intriques inattendues, inédites, perverses et amoureusement diaboliques.

On pourrait juger ça malade, sombre, morbide, obsessionnel... et s'en contenter; mais pour rester à flot dans les eaux chlorées de la critique, il est nécessaire de s’échapper des conventions, aussi vraies soient-elles, et d’offrir de nouvelles perspectives. (A Berlin, la presse étrangère a catégoriquement rejeté The Sea, le qualifiant de « trop méditerranéen" ).

Il me semble plutôt nordique, froid et claustrophobe malgré ses accès de violence et ses accès de passion. Je ne vois l’horizon de lumière nulle part. C'est bien mieux ainsi : la puissance évocatrice du titre se retrouve face à une réalité bien différente.

l'intrigue centrale du film , qui se déroule dans le sanatorium pour patients tuberculeux, semble être traite par un chirurgien. l' établissement est d'ailleurs dépouillé de cette auréole romantique que la littérature et le cinéma lui associent parfois : Les murs s'écaillent, il y a beaucoup de sang, les lucarnes noient le jour... C'est l'habitat où la mort fouette la religion, le désir fouette la culpabilité et l'extase de la culpabilité. Et Villaronga, scalpel à la main, décortique ces entrelacements délicats avec audace.

La photographie est pâle et moribonde mais l'utilisation étonnante de la bande-son(excellente) atténue la sobriété de certaines scènes.

Les acteurs assurent.

L’ensemble est donc remarquable, pervers et s’abandonne à l’inquiétude.

"la mer" n'est pas un film typique, c'est un torrent d'émotions, de sentiments, de sensations et d'expériences, que le spectateur vit et ressent à la première personne, sans concessions ni pudeur, par un "Agustí Villaronga" à nouveau en état de grâce déploie toutes les qualités d'un cinéaste qui sait nager à contre-courant.

#henrimesquida #cinemaetlitteraturegay

HenriMesquidaJr
7
Écrit par

Créée

le 7 avr. 2024

Critique lue 8 fois

HENRI MESQUIDA

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