De nombreuses variations fantaisistes plutôt réussies ont été créées autour du plus mythique des détectives, de La vie privée de Sherlock Holmes de Billy Wilder au Sherlock Holmes de Guy Ritchie (le deuxième volet étant beaucoup moins réussi), pour ne citer que les meilleures. Le film de Thom Eberhardt se glisse parfaitement dans la veine de la version "wilderienne", en plus amusant. Son scénario n’est pas de la plus extrême finesse, et les déductions de Holmes-Watson ne sont pas les plus brillantes qu’on ait vues, mais là n’est pas le principal. De même, le scénario retombe un peu par moments, mais c'est souvent pour mieux repartir.
Les vrais atouts du film sont au nombre de deux : l’inversion Holmes-Watson, Watson devenant le vrai détective et créateur du personnage de Sherlock Holmes, lassé, et cherchant à se débarrasser de ce dernier (il rejoint en ce point Conan Doyle lui-même), et Holmes devenant un acteur simplet, ivrogne et coureur de jupons, qui ne fait que réciter les déductions apprises par Watson. En effet, dans cette version, Sherlock Holmes n’est qu’une invention de Watson, qui en réalité, fait les déductions, et le détective que tout le monde croit connaître n’est qu’un acteur censé incarner le personnage de Holmes en public… Cette inversion est source d’un comique permanent, qui tourne parfois un peu en rond, mais ne peut effacer le sourire qui naît sur les lèvres du spectateur au début du film pour n’en disparaître qu’après le générique (la scène du théâtre, à la fin, est hilarante).
Le deuxième atout du film est le duo inoubliable composé par Ben Kingsley et Michael Caine. Ce dernier confirme qu’il est l’un des plus grands acteurs de sa génération, faisant éclater son génie comique à travers un Holmes d’anthologie. Ce sont ces deux acteurs géniaux qui parviennent à transcender ce qui n’est finalement qu’une petite comédie anglaise sans prétention. Mais les studios Ealing (Tueurs de dames, L’homme au complet blanc, Noblesse oblige, Whisky à gogo), les grands studios de l’âge d’or de la comédie anglaise, nous avaient appris en leur temps que ce sont justement ces petites pépites qui donnent à l’humour anglais ses lettres de noblesse… Ce en quoi Thom Eberhardt, Sir Michael Caine et Sir Ben Kingsley se montrent les dignes héritiers des studios Ealing.