Que les dieux du cinéma me pardonnent, pour traiter d'un film aussi profondément et spécifiquement humain que Elève libre de Joachim Lafosse, je n'ai guère trouvé mieux que d'employer des métaphores animalières, un fois n'est pas coutume...
Dans la première partie du film, tel une araignée, Lafosse lance des fils dont on ne voit pas nécessairement où ils mènent. Des ces trois adultes qui influencent le jeune Jonas, on ne sait rien, on pense d'abord qu'il s'agit de ses parents, d'une famille recomposée et les longs débats sur la vie sexuelle et affective paraissent d'abord plus incongrus que pervers.
Puis Lafosse jette des ponts entre ces fils et l'on comprend que la toile se tisse et que ces adultes ne sont pas ses parents, ni de près ni de loin.
Qui sont ils ? le film ne le révélera jamais, ce qui apparaît de plus en plus clairement dans le récit est le caractère intrusif de cette relation adulte/ado...
Puis la démarche du réalisateur s'apparente davantage à celle d'un boa constrictor tant - passé les premières "caresses" quasi érotiques qu'effleure parfois le film de manière assez troublante - l'étau pervers et manipulateur se resserre tant sur le pauvre Joachim que sur l'impuissant spectateur qui assiste à cette lente mais implacable manipulation mentale de l'adolescent allant jusqu'à l'abus sexuel, poussant le malaise jusqu'à une réelle sensation d'étouffement.
On pourrait facilement reprocher au film d'être aussi pervers que les personnages qu'il crée, mais le réalisateur n'a de cesse d'interroger (sans jamais juger directement) les limites de chacun au cœur d'un film inconfortable et sans aucune concession mais absolument brillant de bout en bout, jusqu'à un fin ouverte et délicieusement ambigüe.
Le film est d'ailleurs dès son générique dédié "A nos limites"...
Tout un programme !
Quelques mots encore sur les acteurs de ce film (et notamment Jonathan Zacaï, impressionnant) avec une mention toute particulière au jeune Jonas Bloquet, à la fois suffisamment beau et sensuel pour être crédible en objet de désir qu'il semble fragile comme on peut l'être à cet âge.
Il porte un rôle très difficile sur ses jeunes épaules et impressionne incroyablement la pellicule.