Désir meurtrier
Le contrôle et la manipulation sont des thèmes récurrents dans les films de Paul Verhoeven notamment quand ce dernier s’entoure de personnages féminins comme l’étaient Nomi (Showgirls) ou Catherine...
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le 26 mai 2016
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Évidemment qu’on salivait, pensez donc. Paul Verhoeven qui signe son grand retour après des années d’absence en filmant Isabelle Huppert dans une histoire de perversions adaptée de Philippe Djan, évidemment qu’on salivait. On bavait même. D’ailleurs Verhoeven, comme si le fait d’avoir manqué au cinéma l’avait ragaillardi davantage, y va sans perdre de temps, il y va sans pitié et sans manières, et la scène matrice du film est d’emblée dévoilée : un viol. Celui de Michèle (Huppert, en mode La pianiste 2), patronne à poigne assumant une féminité redoutable (et redoublée, suite à son agression), à son travail comme dans ses relations avec les hommes et les femmes qui gravitent autour d’elle.
Ses employés, son amant, son voisin (on en parle quand de Laurent Lafitte qui, dans un rôle-clé, peine pourtant à s’imposer et surtout à convaincre ?), son fils et sa copine, son ex mari et sa nouvelle petite amie… On voit bien où Verhoeven veut en venir : magnifier une prédatrice, troublante et volontaire (mais blessée au fond d’elle aussi, un peu quand même). Consacrer une nouvelle fois une amazone, de celles qui ont, sans cesse, enflammé son cinéma, d’Agnes (La chair et le sang) à Rachel (Black book) en passant bien sûr par Catherine Tramell (Basic instinct). Alors pourquoi ce portrait féroce d’une femme, victime qui refuse de l’être (victime) au-delà des conventions et des passions, laisse-t-il à moitié convaincu ? Indécis et frustré ?
Parce qu’à trop forcer les traits, à trop s’engouffrer parfois dans la farce, et presque la parodie, Verhoeven rate en partie ses effets et son soi-disant dynamitage du drame bourgeois français (la scène de drague ringarde à coups de "Tu veux la voir ma chaudière à combustion inversée ?", celle de masturbation, plus lourdement signifiante que réellement tordue, critique facile de la religion via le rôle, transparent, de Virginie Efira…). On a connu Verhoeven plus subtil et plus inspiré, même dans l’excessivité, et on est loin ici de l’élégance roublarde de Basic instinct qui, lui, revisitait avec succès le thriller à la sauce libidineuse. Ici on est pépère, ici on prend le café en disant gentiment quelques gros mots ou en montrant ses fesses (mais cela suffit à grand monde, semble-t-il, pour que l’on parle très sérieusement de… "subversion" et de… "jeu de massacre").
Dans un foutras psychologique mastoc avec mère botoxée qui se tape un gigolo, père serial killer en prison et trauma d’enfance bien lourd, le tout chargé de personnages tous plus bêtes (ou inconsistants, voire les deux) les uns que les autres, d’intrigues secondaires pas spécialement nécessaires (mais censées faire sens) et de dialogues pas toujours justes (la scène où Michèle avoue son viol au restaurant est, dans sa fausse désinvolture, complètement ratée), Elle se consume de ses propres excès. Verhoeven cherche à marier le vicieux au grotesque, l’amoral au saugrenu, et s’il y parvient quelquefois lors de séquences savoureuses (Michèle racontant son sulfureux passé autour d’un cognac, le jeu de séduction avec Kurt, les cendres à disperser…), c’est néanmoins la vague impression d’une défaite qui s’impose, fortement.
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le 27 mai 2016
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