Le premier film de Karim Moussaoui dégage un vent de fraicheur dans les salles au milieu des pompeux titres cannois de la compétition officielle. En attendant les hirondelles c’est d’abord un renouveau du cinéma algérien alors en perdition après des années de guerre civile. Le cinéaste y pose un regard lucide sur son pays et ses habitants. A travers trois histoires entremêlées, Moussaoui évoque trois générations d’algériens qui ont pris le choix de ne rien faire au lieu de celui d’agir. Un promoteur immobilier âgé a choisi de ne pas aider un homme qui se faisait tabasser et s’en veut lorsqu’il réalise que cet homme aurait pu être son propre fils. Un brillant neurochirurgien est rattrapé par son passé où il avait choisi de fermer les yeux sur le viol d’une femme par des terroristes.
En réaction aux récents printemps arabes dans lesquels l’Algérie est restée muette, Moussaoui pointe du doigt l’absence de réaction des algériens et leur manque d’envie d’agir. Mais le salut de l’Algérie passera à coup sûr par la jeunesse que le cinéaste met aussi en scène dans la plus belle partie de son film. Il montre un jeune couple capable de s’affranchir des dogmes de la vieille génération pour se laisser guider par ses désirs et envies le temps d’une danse jusqu’à partager une chambre d’hôtel le temps d’une nuit.
En attendant les hirondelles met en lumière le conflit de génération qui domine en Algérie. Celui-ci est résumé dans une très belle scène où un père et un fils se dispute à propos d’un généreux don de grenade. On y voit un jeune garçon qui, contrairement à son père, est portée par l’ouverture et la confiance aux autres. D’ailleurs cette scène qui nous fait d’abord croire à l’émergence d’un nouveau segment, se révèle finalement n’être qu’une digression. D’autres suivront, notamment une géniale scène chantée qui croit faire bousculer le film dans la comédie musical. La digression au cinéma est assez rare et témoigne, aussi, de la liberté de ton de ce jeune réalisateur décidément prometteur.