La France, ses fromages, ses habitants, ses usines qui ferment. En voici une à Agen, pas assez rentable pour le groupe allemand Dimke. Circulez y a plus rien à voir
Les salariés ne l'entendent pas de cette oreille. Ils sont bien les seuls. La justice, le pouvoir ne les suivent pas ou alors timidement: un conseiller social de l'Elysée les reçoit; le président parle. Mais pour passer à l'acte il n'y a personne
Comment sauver quoi que ce soit dans ces conditions? Là où les dirigeants mettent l'accent sur les forces extérieures à l'aide de mots magiques (concurrence internationale, mondialisation, compétitivité), les salariés rappellent un accord passé il y a deux ans: travailler plus, conserver le même salaire, renoncer à des primes en échangé d'un emploi maintenu pendant 5 ans
Le deal ne tient plus: si les conditions changent alors il faut s'adapter. Ode à la flexibilité, à la mobilité. Toute une époque se résume ici, dans ces personnes qui parlent mais ne se comprennent pas
Et plus ça dure plus des fissures apparaissent. Diviser pour mieux régner, la maxime est toujours en vigueur
En guerre c'est une crise multiforme qui se déplie: crise de confiance, crise de l'emploi, crise nerveuse, crise des solidarités, crise morale, crise sociale. Un emploi n'est pas qu'une source de revenus, c'est aussi un vecteur d'intégration, de reconnaissance, d'existence sociale
La morale n'a plus sa place ici. La parole donnée ne vaut rien. Comment croire en quoi que ce soit désormais? Dieu est mort et tout est permis
On suit donc ces salariés en lutte dans leurs tentatives pour instaurer un rapport de forces qui leur soit favorable. Le pot de terre contre le pot de fer. Avec des plans serrés, l'impression d'un huis clos permanent quelque soit l'endroit où l'on se trouve, Stéphane Brizé nous met au plus près du terrain
Surtout, il se débrouille pour que Vincent Lindon n'écrase pas les autres acteurs/figurants. Gestion des temps de parole, choix de caméra: ils sont plusieurs à graviter autour du phare Lindon
Un film engagé, un film sur des femmes et des hommes en colère. Un film nécessaire