Film en demi teinte s'étant au final révélé être une affaire correcte (il a rapporté le double de son budget), En pleine tempête est un film inespérément généreux pour les amoureux de la mer et d'ambiances portuaires. C'est d'ailleurs ce qui fait en partie la raison de sa tombée dans l'oubli : avant d'être un film catastrophe et de lancer sa tempête du siècle, il s'intéresse en priorité à l'équipage du bateau qu'on va suivre, et se permet de faire plusieurs portraits humains durant la première heure du film. Une longue introduction qui n'a certes pas beaucoup de rythme, mais qui a le mérite de planter avec de nombreux détails le quotidien des pêcheurs d'espadon (les séquences de pêche sont à ce titre particulièrement impressionnantes de réalisme, surtout quand on sait que les poissons sont des animatroniques de Weta, merci Cameron), tout en appréciant le travail des acteurs sur les différentes émotions qu'ils vont développer. A ce niveau, il y aura de tout, certains acteurs agaçants ou effacés, et d'autres plutôt efficaces (John C. Reilly notamment, mais aussi John Hawks et son personnage de looser Bugsy, sans parler du tandem Clooney / Mastrantonio). Mais la variété des différents portraits et une authenticité certaine augmente beaucoup le capital sympathie du film. Et c'est là que demeure sa réussite, car on s'attache beaucoup aux personnages avant de lancer enfin l'attraction du film, et de nous faire souhaiter la survie de l'équipage. Survie à laquelle vient s'ajouter celle des sauveteurs, le film partageant alors son action pour étaler son rythme et offrir des scènes toujours aussi impressionnantes. Les rendus de la tempête sont magnifiques, il s'agit probablement à ce titre d'un des films les plus satisfaisants à ce niveau. Le film a d'ailleurs lissé l'utilisation du numérique en disposant déjà ça et la dans la premières moitié des plans numériques qui habituent là aussi le spectateur à une mer de pixels lissés sous le soleil couchant.


Il y a finalement peu à analyser, surtout à souligner le gros travail d'authenticité qui a été fait sur le cadre de la pêche à l'espadon, et sur la très grande variété des émotions qui sont délivrées par les acteurs et actrices en cours de film (les actrices font un très gros boulot à ce niveau). Quand en quelques secondes on ressent la culpabilité d'être en vie d'un des personnages, on sent qu'avec la grosse machine, un sacré boulot d'écriture a été accompli, sans parler de certains choix du film plutôt efficaces. Bon drame catastrophe qui n'a pas beaucoup vieilli, En pleine tempête est un cru oublié de Wolfgang Petersen à redécouvrir, et qui fait le grand écart avec le futur remake Poséidon qui lui enfilait les clichés à la chaine question émotion (mais qui délivrait la marchandise avec générosité).

Voracinéphile
7
Écrit par

Créée

le 17 oct. 2020

Critique lue 562 fois

9 j'aime

5 commentaires

Voracinéphile

Écrit par

Critique lue 562 fois

9
5

D'autres avis sur En pleine tempête

En pleine tempête
SanFelice
6

Au creux de la vague

La carrière de Wolfgang Petersen est des plus paradoxales. Ainsi, il parvient sans sourciller à faire le pire du pire (Poseidon) ou le meilleur du meilleur (Le Bateau). Il peut faire du grand...

le 5 nov. 2013

23 j'aime

4

En pleine tempête
Ugly
6

Une tempête qui se fait attendre

Le réalisateur du Bateau se remouille pour cet impressionnant film maritime dont le clou est un ouragan titanesque conçu en images de synthèse par les magiciens de I.L.M. La première fois que j'avais...

Par

le 31 janv. 2018

14 j'aime

En pleine tempête
JeanG55
7

The Perfect Storm

Wolfgang Petersen est un cinéaste allemand qui s'est fait connaître par l'impressionnant "Das Boot" avant de se faire happer par la grosse machine hollywoodienne. On y trouve alors chez Petersen du...

le 24 nov. 2023

9 j'aime

8

Du même critique

Alien: Romulus
Voracinéphile
5

Le film qui a oublié d'être un film

On y est. Je peux dire que je l'avais attendu, je peux dire que j'avais des espoirs, je l'ai sûrement mérité. Non que je cède au désespoir, mais qu'après un remake comme celui d'Evil Dead, ou une...

le 14 août 2024

178 j'aime

48

2001 : L'Odyssée de l'espace
Voracinéphile
5

The golden void

Il faut être de mauvaise foi pour oser critiquer LE chef d’œuvre de SF de l’histoire du cinéma. Le monument intouchable et immaculé. En l’occurrence, il est vrai que 2001 est intelligent dans sa...

le 15 déc. 2013

102 j'aime

116

Hannibal
Voracinéphile
3

Canine creuse

Ah, rarement une série m’aura refroidi aussi vite, et aussi méchamment (mon seul exemple en tête : Paranoia agent, qui commençait merveilleusement (les 5 premiers épisodes sont parfaits à tous les...

le 1 oct. 2013

70 j'aime

36