Ce soir, j'ai décidé de revoir ce film. Cela fait longtemps que j'en ai l'envie mais le courage m'a manqué. C'est un des premiers, si pas LE premier Aldrich que j'ai pu voir. Il ne m'a pas plu autant que je l'espérais. Puis j'ai laissé passer le temps et sous les conseils et l'insistance d'un ami, j'ai découvert le reste, d'abord petit à petit (je me souviens avoir lancé "Flight of the Phoenix" un peu par hasard, à l'époque je me faisais automatiquement deux films par soir), puis goulûment puisque j'ai enchaîné pas mal de ses perles en quelques semaines. À ce jour, il me reste deux de ses films à voir, je les ai, ils m'attendent. Je devais les regarder à la suite de ces fameuses perles et puis j'ai pris peur... peur de ne plus avoir de Aldrich à découvrir. Alors j'ai décidé de les regarder un autre jour. Dans pas trop longtemps quand même. Mais surtout, après avoir découvert autant d’œuvres avec tant de bonheur, je me suis dit qu'il était temps de donner une seconde chance à ce "Kiss me Deadly" ; j'avais vraiment envie de l'aimer, peu importe que ce soit par simple attachement envers le réalisateur (le changement de chemise hypocrite) ou bien par un réel émerveillement auquel j'étais resté hermétique à l'époque (temps révolu). Et bien non, ni l'un ni l'autre, je ne suis toujours pas fan de ce film. Mais je me demande si j'aurais été moins sévère en le découvrant aujourd'hui sans connaître le bonhomme ? Peut-être suis-je sévère justement parce que je l'adore? Je ne sais pas.


Ce qui est sûr, c'est que, plutôt que de réécrire une critique comme je le fais habituellement en cas de re-visionnage, je vais plutôt ajouter des notes en caractère gras qui permettront de situer ma pensée aujourd'hui par rapport à celle d'hier.


Film un peu trop surestimé je trouve.
(Haha, ça commence bien : mais qui suis-je pour juger de ce qui est assez estimé ou non ?)


Techniquement, le film est bien sûr parfait (Houla, plus du tout d'accord, ce film est loin d'être parfait), on ne pouvait pas en attendre moins de la part de ce bonhomme d'Aldrich (quel toupet ; j'en parle comme si je connaissais bien le bougre alors que, comme je l'ai écrit plus haut, ce devait être mon premier film de l'auteur que je ne connaissais que de réputation). Des séquences hallucinantes, une mise en scène certainement en avance sur son temps, une harmonie du noir et blanc assez bandante, des mouvements caméra bien foutus, et mis juste là où il faut (bon à part une méchante ombre dans l'appart au début)... franchement la technique est parfaite. Aldrich n'aurait pas fait mieux en le filmant aujourd'hui avec des caméras plus légères.
(Bon, y a pas que des bêtises dans ce paragraphe, il y a vraiment de bonnes choses au niveau technique. Quand je parle d'avance sur son temps, c'est surtout au niveau du rythme nerveux, de la caméra qui bouge bien, du découpage très rapide permettant au spectateur d'être actif... mais je regrette de n'avoir pas souligné à l'époque le côté bancal, certainement dû au fait que ça n'aura été filmé qu'en 3 semaines mais pas que non plus je pense : certaines séquences sont vraiment maladroites, certaines bonnes idées sont gâchées parce que Aldrich les teste, qu'il manque un petit quelque chose qui rendrait le montage fluide. Et puis il y a ces acteurs qui sont tellement mauvais et à qui Aldrich tente de laisser une chance d'épater la galerie avec des gros plans de leurs réactions ; peut-être les acteurs ne savaient pas trop bien à quoi réagir, ou bien ils étaient dans l'urgence, toujours est-il qu'il y a bon nombre de grimaces qui ne passent pas. Pour en revenir au positif, ce qui est bien et que je n'avais pas mentionné, c'est l'utilisation de décors naturels : le trajet en bagnole du début est bon juste parce que ce sont vraiment des acteurs dans une bagnole ; la maison qui flambe à la fin, c'est spectaculaire parce que c'est une vraie maison qui flambe et quand les héros s'enfuient, ils sont vraiment sur une plage... après je sais pas pourquoi ils vont dans l'eau, peut-être besoin de se rafraîchir vu la hauteur des flammes, ou bien un réflexe de survie ?).


Ce qui m'a chagriné c'est l'histoire, et la naïveté qui en découle. L'enquête n'a pas de sens et accumule les invraisemblances (je veux dire la façon dont Mike remonte la piste est peu crédible... sinon je suis totalement à fond avec ce gars qui est obsédé par cette nana morte. ça rappelle un peu le policier du film "Laura") (Je suis encore d'accord avec ça, et j'ajouterai même que c'est un peu mou ce genre d'enquête ou on passe de fausse piste en fausse piste, au final, c'est redondant et on oublie très vite la précédente péripétie. Par contre l'obsession du personnage est sympathique et puis il est amusant de voir que si tôt déjà Aldrich aimait les personnages peu sympathiques en guise de héros, c'est juste dommage qu'il n'exploite pas mieux ce trait de caractère). Il y a des scènes qui sont franchement ridicules, on rit aux dépens du film: par exemple lorsqu'un truand confond son pote avec Mike... et tue ainsi son pote... alors que le corps est simplement allongé sur le lit, et que la coupe de cheveux est radicalement différente. Ce genre d'erreur naïve ne fonctionne pas pour moi, c'est un peu trop gros, même pour l'époque (Ouaip, dans le genre, c'est vraiment la scène du film qui est la plus risible, je pouvais pas choisir meilleur exemple ; les règlements de compte sont aussi un peu marrants, y a aussi un côté expéditif dans certaines scènes, sans doute parce qu'il fallait aller vite). Les personnages sont savoureux mais j'ai trouvé les acteurs assez mauvais dans leurs performances. La scène d'écrasement de doigts fait rire (quand je parlais plus haut de gros plans sur des réactions, celle de Mister Hammer sont assez marrantes, on dirait un gros sadique), le médecin légiste aussi... enfin à part celle qui joue Velda, ils sont tous assez mauvais. Mais bon on peut se dire que c'est parce qu'Aldrich débutait et qu'il ne pouvait pas avoir la crème encore ... (bon, heureusement aujourd'hui, je prends la peine de vérifier, et je constate que Aldrich ne s'était pas entouré de bleus, on retrouve même Paul Stewart qui pourra se vanter depuis sa tombe d'avoir joué dans le premier et le dernier Orson Welles, puisque The other side of the wind verra peut-être une sortie en 2017 grâce à Wes Anderson et Noah Baumbach qui ont cherché de l'argent pour terminer la post-prod, toutes les scènes ayant déjà été tournées par le célèbre cinéaste) et puis aussi, il y a cette fin: tout à coup on n'est plus dans un film noir, mais dans un film de la Hammer, on attend Vincent Price et ses potes au tournant.


Donc en gros je suis déçu du contenu, alors que ça commençait plutôt bien (vraiment très bien) (pas si bien que ça en fait à cause de la mise en scène un peu maladroite mais bon, c'était quand même chouette). L'humour si fin de Aldrich (là par contre, je ne sais pas où j'ai été pêcher un humour fin) est ici dépassé par la moquerie qu'on peut faire de certaines scènes. Le contenant est lui parfaitement maîtrisé (ce qui est génial pour un début de carrière au cinéma) (halala je n'en finirai jamais de dire des bêtises) mais ne suffit pas à éviter les problèmes scénaristiques.


PS Ah oui, j'ajouterai que le film contient une des premières (si pas la première) paire de fesses féminine motivant un travelling (comme on en voit tant aujourd'hui). Quel coquin ce Aldrich (ben en plus ça m'a encore fait sourire ici, comme quoi je n'ai pas beaucoup changé depuis mes débuts sur le site).


Bon, en fait mes notes étaient bien plus longues que prévu, je me demande si je n'aurais pas mieux fait de réécrire ma critique (tout en laissant l'ancienne en dessous, bien évidemment) mais, bah, ça permet de me moquer un peu de moi et de mon arrogance toute naturelle, ce qui n'est pas un mal. Et je précise, peut-être un peu tardivement, que la note est restée inchangée.

Fatpooper
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le 18 oct. 2011

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Fatpooper

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