Les gens semblent oublier que Wolfang Petersen a réalisé autre chose que L'Histoire sans fin, et certains préfèrent pourtant des films encore moins connus que Enemy, alors que ce dernier mélange quelques éléments de La Conséquence du même auteur (1977) et même de l'Histoire sans fin. D'autant que ces trois longs-métrages sont des adaptations de livres.
Enemy, c'est un peu La Conséquence mais sans les mêmes dangers que cela implique pour le personnage principal (Willis Davidge, incarné par un génial Denis Quaid surtout quand il est barbu) et dans un univers à L'Histoire sans fin moins fantasy et plus science-fiction, plus mature et avec des enjeux plus universels.
Il est vrai que le début du film, bien que le héros Willis soit un astronaute américain doublé par Richard Darbois (comme pour le film d'horreur/SF plus chtonien Lifeforce, l'étoile du mal que j'ai aussi adoré malgré ses défauts indéniables), laisse présager du mauvais série B avec ses 1ers vaisseaux en effets spéciaux 3D mal vieillis voire mal incrustrés.
Mais heureusement, dès que notre héros tombe sur la planète abandonné avec son "ennemi", un Drac nommé Jeriba ("Jerry" pour les intimes, un E.T. saurien mi-homme mi-femme), tous les éléments et acteurs du film arrivent à transmettre des émotions à la fois de peur, de tristesse, de compassion et d'émerveillement comme dans The Neverending Story.
Car même si les aventures et les dangers qui guettent Willis et Jeriba ne sont pas aussi dangereux que ceux de films d'action-aventure passés ou actuels, ils restent marquants et d'une importance quasi cosmique (les scènes avec les vers géants m'effrayent... encore à mon âge, c'est vous dire le pouvoir de transmission d'émotions de Enemy Mine).
Tout comme Willis, on aura beaucoup d'attachement face à Jeriba et ses larmes, Jeriba et sa longue lignée heureux d'apprendre la votre plus courte, Jeriba qui peut donner la vie bien que ni homme ni femme, Jeriba qui veut que son enfant Zammis ait son nom inscrit dans sa lignée auprès du Conseil des Sages Dracs.
Et notre Willis est heureux d'élever Zammis comme si c'était son propre fils.
D'ailleurs, ça se trouve que c'est aussi son fils bien que n'ayant pas eu d'acte charnel avec Jeriba. Le film s'avère très humaniste et progressiste à ce sujet, puisqu'au fond Zammis a été presque élévé par deux papas et s'en est bien tiré comme Simba dans Le Roi Lion... XD !
Et finalement, le plus grand danger pour Willis n'est pas de ne jamais retrouver la Terre ou sa station spatiale adorée, mais plutôt de ne pas pouvoir remplir la promesse faite à Jeriba et de voir les siens confrontés au pire de l'humanité. La même portion qui l'avait remplie de la même haine aveugle et infondée sur les Dracs.
Et ce n'est pas que pour Jeriba, pour lui-même ou que pour les Dracs opprimés ou l'humanité que Willis agit, mais pour le bien de Zammis et de son droit fondamental à être inscrit dans le registre universel. Enemy est donc un film qui, comme E.T., met l'humanité face à ses responsabilités et appelle s'ouvrir face à l'étranger offrant un respect mutuel. Un film merveilleux sur la coexistence cosmique comme on n'en voit plus.
Vraiment, Wolfang Petersen a inscrit ce long-métrage dans ma mémoire comme Willis a inscrit son nom, celui de Zammis et de Jeriba dans le registre de la Lignée des Étoiles...