"Énorme" (2020) de Sophie Letourneur se présente dans sa bande annonce comme une comédie française misant sur l'absurdité du personnage d'un homme prenant son rôle de père trop à coeur. Une fois le film vu, on se rend compte que derrière l'humour se cache un sujet bien plus...grave.
Alors oui, on rit devant Énorme. L'humour y est généralement bien dosé, bien que parfois un peu trop lourd, mais ce dernier à toujours un goût particulier lorsqu'il sort de la bouche de Jonathan Coen, acteur fétiche d'une génération Canal + numérique (Bloqué, Serge le Mytho...), mais aussi et surtout bon comédien, bien qu'ayant joué dans des gros navets, dont Terrible Jungle (2020) et Budapest (2018). Attachant, le jeune papa prend son rôle à coeur (sa propre mère joue dans le film), et est pleinement investi dans son personnage faussement généreux, là où Marina Foïs bien que toujours très juste dans sa manière de jouer, manque un peu de profondeur dans un rôle de pianiste, comme si elle se retrouvait enfermée dans un scénario pas adapté pour elle. Elle reste donc à la surface en subissant le déroulement de l'histoire, et nous a habituée à bien mieux.
Mais voila, "Énorme" parle d'un sujet horrible, dont il est important de parler : la fécondation forcée. Le fait de modifier secrètement la contraception pour faire tomber l'épouse enceinte.
Si le moyen le plus connu (et le plus ignoble) consiste à enlever le préservatif pendant l'acte sexuelle sans prévenir sa partenaire, il en existe d'autre, comme trafiquer sa pillule. Passible de 30.000 euros d'amende et de deux ans d'emprisonnement, rien que ça. Si le film mise sur l'émotion,
avec une scène réellement bien mise en scène sur un accouchement compliqué
, il ne revient pas sur le caractère illégal de son propos, et sur sa gravité. Plutôt que de l'exposer le sujet au grand jour, ce qui aurait était particulièrement intéressant, il le contourne assez lâchement, ce qui est selon moi regrettable... Je pense tout de même que vu l'importance du sujet, il s'agit plutôt d'une maladresse d'écriture (le film ayant été réalisé par une femme, qui n'aurait aucun intérêt à aller contre... les femmes), et pas d'une mauvaise intention.
Dommage, Énorme avait pourtant du potentiel ! Ne comptant que les deux comédiens à son casting, la réalisatrice s'est appuyée sur la réalité (en intégrant des réelles sages femmes et professionnels du corps médical, en filmant les choses comme elles se sont réellement passés... le film prend donc une tournure documentaire intéressante, mais cette dernière ne peut pas nous faire oublier le manque de considération de la gravité de son sujet principal.