C'est une petite pépite que propose ESPN avec Once Brothers, reportage s'intéressant à la relation entre le pivot Vlade Divac et le Mozart du Basket, le croate Dražen Petrović, mort d'un accident de voiture alors qu'il était en pleine gloire, et dont la vie a été terriblement marqué par les Guerres d'indépendance qui sévissaient dans la Yougoslavie du début des années 1990.
Ce documentaire montre à quel point comment la Guerre, la haine ou encore les tensions idéologiques et territoriales ont pu séparer de vrais amis et coéquipier, comment un simple geste innocent peut vous faire passer comme un symbole, et faire basculer votre vie et le regard de ceux vous entourant. On a l'impression que tout s'est passé à une vitesse folle dans les changements idéologiques de la fin des années 1980 puis le début de la décennie 1990, que le statu d'ami a vite été transformé en ennemie, et Once Brothers parvient à capter cette tragique révolution, tant dans l'intimité que dans l'Histoire.
Le réalisateur prend surtout le point de vue de Vlade Divac, évoquant d'abord l'amitié, la génération dorée, les titres en Europe puis au Championnat du monde, avant que, presque simultanément, les deux joueurs débutent en NBA pendant que les tensions en Yougoslavie s'intensifient. Pendant que le pivot avait la chance de débuter au côté de Magic Johnson dans des Lakers qui lui faisaient confiance, le Mozart du Basket devait attendre son tour dans une très bonne équipe de Portland, mais dans une NBA qui ne faisait pas encore confiance aux Européens et avec une surpopulation au poste d'arrière / meneur (l'intouchable Clyde Drexler, Terry Porter, Danny Ainge...). D'ailleurs, ils feront chacun à la suite une malheureuse finale NBA, Petrović face au Bad Boys de Détroit en 1990, puis Divac qui sera témoin du premier titre de Jordan une année plus tard.
Un transfert sera salvateur pour l'arrière d'origine croate, et c'est aux Nets de New Jersey qu'il explosera, devenant même le premier européen à finir dans un des trois cinq majeurs de la ligue en 1993. Période durant laquelle il ne parlera plus à Divac, ne se considérant plus comme yougoslave et ayant mal interprété un geste du pivot qui rejeta un drapeau croate après le titre de champion du monde en pensant juste à l'unité de son groupe. Le documentaire montre assez bien comment des idéologies nationalistes, touchant tout le monde, ont pu séparer ces gars, et même la façon dont on leur disait, une fois rentré au pays, à qui ils pouvaient parler ou non, ainsi que la façon dont le sport a pu les faire avancer dans la vie.
Once Brothers est très bien et efficacement construit, mélangeant interview de maintenant et d'avant, ainsi que de rares images d'archives. On se retrouve littéralement plongé au cœur de cette histoire et ce conflit, et l'on ressent toute la dramaturgie qui en ressort, les vies humaines enlevées, la peur de tous les instants et la façon dont on peut vivre avec, et malgré, cela. Le documentaire n'en fait jamais trop, il y a une réelle sincérité qui ressort, et de l'émotion, notamment lorsque la mort de Petrović est mise en avant, et on ne ressort pas indemne de la vision de ces images, raconté, en partie, par un Divac touchant.
ESPN propose avec Once Brothers un passionnant, immersif et émouvant documentaire autour de la tragédie Dražen Petrović, sa relation avec Vlade Divac, ainsi que l'ombre des changements politiques sanglants en Yougoslavie, et il en ressort une touchante sincérité ainsi que des images pertinentes et fortes.
Lien pour Once Brothers.