Voilà un film qui, comme son réalisateur, jouit d'une piètre estime chez les cinéphiles. Pourtant, s'il n'est de loin pas le plus inventif des cinéastes hollywoodiens, Harold Becker sait tirer le meilleur de ses interprètes, souvent prestigieux. C'est le cas dans le sympathique Mélodie pour un meurtre (avec Al Pacino et Ellen Barkin) ou le tout aussi inoffensif Malice (avec Alec Baldwin et Nicole Kidman), des films noirs qui misent avant tout sur le divertissement. Etat de choc par contre, aborde un sujet des plus sérieux, l'ascension et la chute, sur fond d'addiction à la coke (et plus si affinités) de Lenny Brown, un vendeur surdoué spécialisé dans l'escroquerie immobilière. Ici c'est le toujours impeccable James Woods qui apporte une dimension tragique saisissante à son personnage d'arnaqueur new-yorkais au charisme logorrhéique pour qui l'idée de bonheur se résume à une villa avec piscine, une Mercedes et une table réservée dans le meilleur restaurant de la ville. Une situation qu'il obtient presque d'un jour à l'autre à Los Angeles avant de tout perdre aussi rapidement à la suite d'une nouvelle loi fiscale et une dépendance grandissante à la cocaïne... Bien sûr on n'est pas chez Schrader ou Scorsese: Lenny Brown n'a rien de christique et l'idée de rédemption ou de transcendance n'effleure pas cet Américain tout ce qu'il y a de moyen, tout comme elle n'intéresse pas le cinéaste qui se contente de décrire avec réalisme mais sans forcer la note, cette descente aux enfers ordinaire. Ce qui nous vaut quelques traumatisantes scènes de défonce jusqu'à un final d'un rare désespoir pour un film commercial américain.