On connaissait le Selection reader digest Trần Anh Hùng invente le Selection filmeur digest. 1h55 pour raconter façon compilée la vie d’une famille sur trois générations… Avec une focale spécifique sur les femmes qui la compose. Globalement, ça nait, ça tombe amoureuse, ça fait des enfants (beaucoup de préférence), quelques papouilles, accessoirement une petite balade au jardin et ça meurt. La femme n’ayant alors comme unique vocation que d’aimer son mari et choyer la progéniture. Abstraction totale de qui elle est vraiment, de l’époque dans laquelle elle évolue. Elle n’est qu’une génitrice. Peut-être est-ce la vision de l’éternité d’Alice Ferley (je n’ai pas lu le roman) mais à l’écran elle devient celle de Tran Anh Hung. Désolé, mais je m’inscris en faux.
En passant outre cette réductrice pensée, je ne trouve quasi aucune qualité au film. Le fait de passer aussi vite sur les destins de chacun noie toute unité de temps ou presque. Seuls les décors impressionnants marquent bien les décennies qui s’enchainent. Beaucoup plus que la farine dans les cheveux et les rides siliconées utilisées pour grimer une Audrey Tautou totalement égarée dans ce grand bazar ! Elle n’est pas la seule. Laurent ne semble pas comprendre son rôle, et Béjo est dissipée… Les acteurs quant à eux sont inexistants dans le scénario et donc à l’écran.
La musique omniprésente, composée de morceaux classiques savamment choisis (une vraie compil de chez Carrefour) se fait pompière et assourdissante, la voix off insupportable au point d’étouffer toute tentative de dialogues qui se limitent à des banalités.
La photo quant à elle, hyper léchée et vaporeuse tend à faire sourire plutôt que d’éblouir. De mémoire on n’a rien vu de pire depuis David Hamilton !
La mise en scène est inexistante, où plutôt donne l’impression qu’elle a été également sacrifiée au montage. Quelques scènes commencent plutôt bien, mais on passe à autre chose. A un point tel que l’on en vient à confondre les prénoms, les liens de parentés… Mais peut-être cela est-il dû au manque probant d’intérêt de l’ensemble.
Seul le travail d’Olivier Bériot sur les costumes mérite une attention toute particulière, et malgré un tel cahier des charges, le moindre détail d’étoffe, d’agrafe, de dentelle est remarquable.
A souligner également les présences de Valérie Stroh, Philippine Leroy Beaulieu et Irène Jacob qui cumulent à elles trois 5 minutes de film, c’est un peu rageant !
« Eternité » s’inscrit d’ors et déjà comme le plus beau plantage de l’année, voire de la décennie. Sur la forme il a tout d’une campagne promotionnelle de « Mon jardin et ma maison », sur le fond les messages véhiculés tiennent plus de « Valeurs actuelles ». A éviter donc à moins d’avoir énormément de temps à tuer sans trop réfléchir, ou de vouloir profiter d’une bonne clim fraîche en ce début d’automne caniculaire.