Il serait presque mensonger de dire que Ève a commencé vaut le détour pour autre chose que la prestation qu'y donne Charles Laughton, tant il phagocyte absolument tout sur son passage, que ce soit ce pauvre Robert Cummings en manque de charisme ou la beaucoup plus convaincante Deanna Durbin. Il y incarne le patriarche Jonathan Reynolds au seuil de la mort, ou du moins c'est ce que pense toute la maisonnée, du médecin de famille au majordome en passant par le fils un peu pleutre. Problème : sa dernière volonté serait de rencontrer sa belle-fille mais cette dernière est introuvable. Le fils, dans un moment de panique, conforté par le docteur dans l'idée qu'on assiste à son dernier souffle, demande à la première venue de jouer le rôle de ladite belle-fille afin que le vieux s'en aille dans un moment heureux. Nouveau problème : après cette rencontre, le père tombe sous le charme de l'inconnue. Pire, comme le soulignent tous les journalistes attroupés dans les parages pour avoir le scoop de la mort du riche vieillard : il semblerait qu'il ne soit plus du tout prêt à mourir.


Bon, on ne va pas se mentir non plus sur le contenu du scénario qui est presque entièrement prévisible une fois cette situation-là posée. Bien sûr, l'inconnue dépêchée au chevet du père pour 50 dollars tombera amoureuse du fils et, bien sûr, le fils remettra en question son mariage avec sa promise originelle pour suivre son cœur fraîchement bousculé par la belle inconnue aux très nombreux talents. Deanna Durbin, au piano et au chant, ne laisse aucun homme insensible dans la maison semble-t-il. Étonnant, mais pourquoi pas après tout.


Mais en dépit de ces réserves, It Started with Eve regorge de séquences comiques vraiment hilarantes, et c'est principalement cet humour du quiproquo qui vaudra (ou non, selon les sensibilités et les inclinations) le détour. Charles Laughton, dans un rôle pas si éloigné de celui qu'il tiendra dans Témoin à charge avec Billy Wilder 16 ans plus tard (et qui lui vaudra un Oscar), s'en donne à cœur joie pour faire exploser les conventions qui régissent la famille, que ce soit en mangeant et fumant dans le dos du docteur (quitte à fourrer son cigare sous la couverture ou dans la bouche du majordome et à planquer un pilon de poulet sans la poche de son costume) ou en cherchant à mieux connaître cette fille qu'on lui présente comme sa bru. Il faut voir la tête de ceux au courant de l'entourloupe, prisonniers de leurs mensonges, lorsque le père commence à dévoiler le code du coffre-fort à cette inconnue et à lui léguer les bijoux de famille d'une valeur inestimable. La connivence entre les deux atteindra son apogée lors d'une petite escapade en ville, dans un dîner mondain, au sujet d'une côtelette d'agneau dans un cendrier... Le fou-rire est contagieux. Un joli festival de bouffonneries, intérêt unique mais notable du film.


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Morrinson
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le 28 avr. 2021

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Morrinson

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