Projeté en ouverture de la Mostra de Venise ainsi qu’au festival de Deauville, Everest a débarqué sur les écrans français le 23 septembre dernier. Le long-métrage de l’islandais Baltasar Kormákur (2 Guns, Contrebande) relate l’histoire vraie de l’ascension tragique du toit du monde en 1996. Le film a été adapté du livre « Tragédie à l’Everest » écrit par le journaliste et alpiniste Jon Krakauer, qui a pris part à l’expédition pour le magazine Outside.
Le film se divise en deux parties : l’ascension de l’Everest et la descente désastreuse due à une terrible tempête. Durant la première partie, le spectateur est complètement happé par la beauté des paysages montagneux et de la neige éclatante. Les prises de vue sont telles qu’elles facilitent l’immersion, encore plus intensifiée si le visionnage s’effectue avec la résolution IMAX 3D. Nous pouvons suivre pas à pas le groupe d’alpinistes, plus ou moins chevronnés, dans leur lutte acharnée contre le manque d’oxygène et la frigorification de la peau sous l’air glacial. Le groupe se déplace, avec plus ou moins de difficultés selon l’expérience de chacun, sous l’égide de Rob Hall (Jason Clarke), guide de la compagnie Adventure Consultants, qui tente de trouver des solutions aux obstacles rencontrés par le groupe sur le parcours les menant au sommet.
Le film s’axe particulièrement sur la psychologie des personnages, leur appréhension à gravir les différentes étapes du camp de base au camp n°4, appelé aussi zone de la mort et dernière étape avant le sommet, en passant par la cascade de glace. Chacun rencontre une dissonance cognitive marquée par une contradiction entre les efforts qu’ils sont capables de mobiliser et leur rêve de gravir le plus haut sommet du monde. Il est difficile de voir les rêves s’écrouler pour quelques uns tant leurs limites ont été franchies par leur corps engourdi par le froid et l’oxygène qui leur manque cruellement, laissant le spectateur impuissant face à ce désespoir.
En raison du respect pour les victimes, les choix entrepris par les guides à continuer à grimper malgré la tempête qui s’annonçait n’ont pas été commentés mais la question du pourquoi une telle folie demeure dans les esprits. Seuls des alpinistes chevronnés et passionnés pourront nous répondre car il faut faire partie de cette communauté pour vraiment comprendre.
Le film est là également pour lancer un message d’alerte quant à la surfréquentation des camps et des pistes équipées par les Sherpas, l’Everest est devenu une attraction où différentes compagnies d’excursion entrent en compétition. La nature a ses droits et le film est là pour nous rappeler que la nature sera toujours plus forte que l’homme. Quand la tempête se lève, que les éléments se déchaînent, l’homme, qui manque déjà d’oxygène et dont le corps se pétrifie, ne peut rien faire. Le Népal a d’ailleurs envisagé de restreindre l’accès à l’Everest aux seules personnes bénéficiant de bonnes capacités physiques et ayant déjà gravi des sommets de plus de 6 500 mètres. La surfréquentation est un risque à la fois pour la nature, pour l’environnement mais aussi, et surtout, pour l’homme. Cette suggestion a émergé suite à l’avalanche meurtrière qui a dévalé sur le camp de base du versant Sud de l’Everest, le 18 avril 2014, emportant la vie d’une dizaine de personnes.
Le casting du film est excellent, il a fallu tout de même engager des acteurs en bonne condition physique pour supporter un tournage éprouvant. L’équipe du film n’a pas en réalité gravi l’Everest puisque les scènes ont été tournées en partie au camp de base, dans les Alpes italiennes et enfin en studio pour ce qui concerne le sommet, la cascade de glace et la scène de l’Hillary Step. Cependant, la difficulté de projection pour un spectateur lambda fait que l’identification aux personnages reste difficile voire impossible et les épouses éplorées ne font que rajouter du pathos à l’ensemble. De la même manière, les propres histoires dramatiques des alpinistes s’engageant dans l’expédition meurtrière semblent avoir été grossies pour favoriser l’empathie du spectateur.
Au final, Everest est un film spectaculaire et immersif dont les images sont saisissantes et la tension sans cesse présente. De quoi vous faire frissonner !