Il fut un temps, l'idée de l'histoire de Moïse revisitée par Ridley Scott (qui, avec son "Alien" entre autre, est celui qui m'a définitivement donné envie de faire du cinéma) aurait pu être un projet bien excitant.
Ouais, "il fut un temps"...
Car depuis quelques années déjà, Ridley Scott est passé du statut de metteur en scène ambitieux et percutant à, au mieux, celui de simple réalisateur très efficace et divertissant. En soit, c'est déjà pas mal, mais cela reste frustrant. Bref, je tergiverse...

Dès le début du film, ses plus gros défauts sautent vite aux yeux.
"Vite", c'est bien le mot clé. Le film fait 2h30, et pourtant, on a juste l'impression d'assister à une accumulation de scénettes de 4 (allez, 5) minutes. Volonté de rythmer et de conter l'essentiel de ce mythe biblique colossal? Sans doute, mais les bonnes intentions ne font pas les bons films...

Quoi de mieux, pour incarner tous ces Égyptiens et ces Hébreux, que de prendre de grandes stars Hollywoodiennes bien blanches? Rien de nouveau, en soi. Et qu'importe ! Si ces grands acteurs incarnent avec brio de grands personnages bien écrits, tout va bien... Et c'est là qu'est l'os !
Scott déroule et découpe son histoire de manière très mécanique sans insuffler aucune émotion ou profondeur à son récit. Trop occupé à présenter son histoire trop ambitieuse, le film multiplie les personnages sous-développés au possible. Myriam, Yokébed, Aaron, Jethro, Séphora, Séthi... Des figurants qui ne servent que de prétextes scénaristiques, le tout avec des ellipses foireuses (seules 3 courtes scènes séparent la rencontre Séphora / Moïse de leur mariage...).

Mais bon, ce ne sont que des "personnages secondaires". Quid des 2 principaux, Ramsès et Moïse ? les frères devenus ennemis en raison de leurs différents idéologiques, politiques et religieux…

Eh ben ici, Moïse et Ramsès (déjà extrêmement peu développés pour eux-mêmes) ne partagent... Rien. Rien du tout, si ce n'est certains cadres. Si les dialogues ne nous rappellent pas qu'ils sont officiellement frères (ou alors "cousins", même, selon la VF...), le film n'en a plus rien à foutre. On a plutôt l'impression de voir, dans le cas de Ramsès, un héritier beauf et bourrin (style Vin Diesel dans ses rôles les + pauvres) qui se tape la discut' avec son frère adoptif Moïse, guerrier pragmatique, franc, athée et.... WHAT?

"Moïse" et "athée" dans la même phrase??? N'étant moi-même pas croyant et très ouvert aux adaptations, on aurait pu penser que voir Moïse rire de la crédulité religieuse de son père face à une pythie me plairait... Sauf que non. Quand on adapte explicitement La Bible, où Dieu est un vrai personnage à part entière, on fait avec. On accepte l'univers, quitte à en profiter pour faire un constat sur la religion ("Noé" d'Aronofsky). Ici, en + d'être invraisemblable (je ne crois pas que Moïse aurait vécu très longtemps si il affichait autant son scepticisme, car blasphème), cela détruit toute la puissance et le symbole de cette histoire.

Tout le problème "interprétatif religieux" de cette version est là : Bien que trop scolaire, factuel et désincarné sur la vision de l'histoire, paradoxalement les rares libertés prises par le film sont tellement peu assumées qu'elles gênent. L'idée de donner une explication/suite logique aux plaies d’Égypte est intéressante. Mais très vite, finies les explications rationnelles, on préfère revenir à la thèse des miracles pour les éléments les + "forts"... Bref, peu assumé. Je ne préfère même pas parler de l'incarnation de Dieu dans cette version qui, si elle était intéressante sur le papier, est une nouvelle fois gâchée par un manque intégral de profondeur, comme les autres personnages.

Concernant la réalisation purement technique, là non plus rien à retirer de spécial. Si ce n'est de superbes décors naturels et quelques costumes impressionnants.
Certes, certains plans restent très sympas, bien que dégoulinants de numérique criard et peu impressionnant.
Certes, la musique est correcte, bien que beaucoup trop présente, sans saveur et surlignante de l'action.
Même la 3D, pourtant assez bonne, n'est jamais vraiment mise en valeur, la faute à un découpage technique trop peu approprié (suite de plans rapprochés avec faible profondeur de champ... Quelle bonne idée...).

Ambitieux? Oui. Stylisé? Oui. Prenant? Non.

En 1998, "Le Prince D’Égypte" était un dessin animé familial, avait des chansons à la Disney, ne durait qu'1h40 et osait compresser la dimension biblique pour montrer des personnages humains avant tout, victimes de leurs symboles et de leurs missions... Adulte, sombre, poignant et fidèle à l'histoire Biblique sans se transformer en pamphlet religieux ni en critique religieuse.

Bref, "Le Prince D’Égypte" c'était tellement mieux...
Clément_Ringot
4
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le 17 janv. 2015

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Jonsey Norgit

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