- Tom, nous sommes vraiment très au Nord ce coup-ci.
- Ce sont les ordres : aller aussi loin que possible au Nord.
- Oui. C'est chez toi ici, en fait tu as juste envie de voir ta fiancée.
- Ça c'est sûr.
- Alors je vais te dire un secret : on doit couper les lignes yankees, pas charmer les filles du coin.
- Si cette guerre se termine, la première chose que je fais c'est d'épouser cette fille.
- Mon ami, tu cherches les ennuis. Quand tu as choisi le Sud, tu aurais dû la quitter.
Justice ou injustice ?!
Fais ta prière Tom Dooley, réalisé par Ted Post est un western dont je n'attendais pas grand-chose et qui finalement m'a agréablement surpris de par le sujet fataliste qu'il traite brillamment. Une oeuvre inspirée d'un fait réel qui fut un véritable évènement journalistique entourant Tom Dula, qui fut reconnu coupable et pendu en 1866 pour le meurtre barbare de Laura Foster, sa présumé fiancée, froidement assassiné de plusieurs coups de couteau.
(Pour plus de précisions sur l'histoire vraie de Tom Dula : https://fr.wikipedia.org/wiki/Tom_Dooley).
L'histoire du film emprunte un tout autre chemin, s'appuyant sur la fameuse phrase que prononça Tom Dula avant d'être pendu devant la potence : "Messieurs, voyez-vous cette main . Elle n'a pas touché un cheveu de la tête de cette femme."
Une justice au gout d'injustice.
Pendre un innocent, voilà de quoi il est question, sauf qu'ici le meurtre orchestré n'entoure pas que celui d'une jeune femme, mais également celui de soldats nordistes. Le soldat confédéré Tom Dooley dirige une attaque groupée contre un convoi nordiste, ignorant que la guerre était déjà terminée et qu'un traité de paix avait été signé. Un acte criminel faisant passer le statut de soldat héroïque de Dooley à celui d'assassin condamné à être pendu. Suite à cela, Dooley, accompagné de son fidèle ami Richard Rust qui faisait lui aussi partie de l'assaut contre le convoi, se trouva à prendre la fuite. Cependant, Dooley refuse de partir sans sa fiancée "Laura Foster" qu'il n'a pas vue depuis deux ans. Il va prendre tous les risques en repassant dans sa ville natale dans l'espoir de retrouver sa bien-aimée pour l'épouser et s'enfuir avec elle. Seulement, le temps est compté. Un récit dramatique sur l'après-guerre mettant en avant ceux que l'on appelait les "Rebelles".
Les comédiens principaux, Michael Landon, Richard Rust, Jo Morrow et Jack Hogan, s'avèrent étonnamment persuasifs et décisifs. Malgré le jeune âge de ceux-ci, ils captivent parfaitement l'attention émotionnelle sur le plan en offrant des performances non pas éblouissantes, mais certainement réalisées. Michael Landon, en tant que Tom Dooley, fait du bon boulot, bien qu'un brin monolithique, sans être inexpressif non plus. Il incarne un personnage confus qui fait face à de mauvaises chances malgré son grand sens moral et amoureux. Il personnifie une tragédie dont on espère qu'elle aura une conclusion moins dramatique que ce que laisse supposer l'histoire vraie. Richard Rust, sous les traits de Country Boy, est la plus grosse surprise du casting, allant jusqu'à voler la vedette à Michael Landon. C'est un excellent acteur au regard perçant que je découvre pour la première fois, et il offre une prestation de caractère en tant que vétéran fidèle à son frère d'armes. Jo Morrow, dans le rôle de Laura Foster, brille par le sentiment qu'elle dégage envers celui qu'elle aime. Elle rayonne de mille feux lors de la difficile séquence finale. Jack Hogan, en tant que Grayson, incarne magnifiquement le rival amoureux pourri et jaloux que l'on aime détester et qu'on aimerait voir disparaître pour laisser le couple en paix. C'est une menace à la hauteur du récit proposé. On retiendra également la participation d'Howard Wright dans le rôle du shérif Dobbs.
Malgré son budget ridicule, qui se sent par le manque de décors ainsi que les villes vides de personnages, la réalisation de Ted Post propose une superbe photographie en noir et blanc qui valorise intelligemment les diverses séquences. Tout comme "Le Train sifflera trois fois" de Fred Zinnemann, "Fais ta prière Dooley" est tout du long accompagné d'une chanson interprétée par le groupe "Kingston Trio", qui a repris une ancienne chanson populaire tout droit sortie de la Caroline du Nord, avec des paroles qui ont servi de moteur créatif autour du scénario du film. La version française est chantée par Les Compagnons de la chanson, qui s'en sort plutôt bien. Attention cependant ! À la fin du film, vous allez passer plusieurs jours avec l'air de la chanson en tête.
Les diverses actions proposées fonctionnent parfaitement avec le récit qui, durant ses 79 minutes, est frappé de multiples péripéties qui assurent un bon rythme sans pour autant perdre la moindre nuance émotionnelle. La toile de fond présentée par l'intrigue entraîne un lot de circonstances aggravantes qui ajoute toujours plus à la tension. Chaque fois que l'on se dit "cela ne pourrait pas être pire", une série d'événements vient nous contredire. Une régularité dans l'écriture et la mise en scène admirablement bien construites permet de ne proposer aucune scène de remplissage futile. Ce n'est pas des plus innovants, mais c'est certainement bien dirigé. Plusieurs séquences sont de qualité, je retiens en particulier le duel au corps-à-corps plutôt destructeur entre Michael Landon et Jack Hogan, qui souffre malheureusement d'une petite accélération d'image inutile ; l'évasion de Richard Rust dans la grange de la vieille Meg (Cheerio Meredith) qui offre un moment de tension savoureux ; ou encore la séquence finale qui est absolument grandiose, avec une mise en scène des plus fascinantes autour d'un cadre renversant.
CONCLUSION :
Fais ta prière Tom Dooley est un western dramatique à petit budget à ne clairement pas sous-estimer. Une oeuvre étonnante inspirée d'un fait réel qui cache plus d'une balle dans son révolver et que l'on prend plaisir à découvrir. Ce n'est pas parfait, certains défauts de budget se font ressentir, mais le résultat final reste clairement au-dessus des attentes. Le début d'un réalisateur de talent qui avec peu parvient à faire pas mal de bonnes choses comme de s'entourer de bons jeunes comédiens capable de tenir intelligemment le rythme sans perdre en dramaturgie, et de livrer de bonnes séquences comme lors de l'acte final qui reste d'excellentes factures.
Un grand merci à messieurs Patrick Brion et Bertrand Tavernier qui à travers leurs analyses du film ont réussi à me convaincre de laisser une chance à ce western.
Fais ta prière, Tom Dooley
Fais ta prière et verse une larme
Fais ta prière, Tom Dooley
Mon pauvre ami, tu vas mourir
Je l'ai retrouvée sur la montagne
Je lui ai ôté la vie
Je l'ai retrouvée sur la montagne
Et là je l'ai poignardée
Demain à la même heure
Va savoir où je serai
Sans ce fichu Grayson
C'est au Tennessee que je serais
Mais c'est comme ça, mon pauvre ami
Fais ta prière et verse une larme
Fais ta prière, Tom Dooley
Mon pauvre ami, tu vas mourir
Demain à la même heure
Va savoir où je serai
Seul au fond d'une vallée
À me balancer au bout d'une corde
Fais ta prière, Tom Dooley
Fais ta prière et verse une larme
Fais ta prière, Tom dooley
Mon pauvre ami, tu vas mourir
Mon pauvre ami, tu vas mourir
Mon pauvre ami, tu vas mourir
Mon pauvre ami, tu vas mourir.
Mon analyse que vous pouvez retrouver sur ma chaîne YouTube spécialement dédiée aux westerns : https://www.youtube.com/watch?v=hAaT3pGyJ8c