Des paysages ruraux légèrement inhabituels. Des bottes de foin dispersées çà et là. Une jeune fille qui joue du cor allongée sur l'herbe. Et une vache qui semble glisser sur l'herbe. Tranquillement. Euh... Hein ? Puis une deuxième. En marche arrière. L'explication ne tarde pas : on est aux Pays-Bas, les animaux transitent sur des barques et sillonnent les nombreux canaux comme autant de routes de campagne (qui ici n'existent pas). Le gag visuel donne assez clairement le ton de la comédie qui va suivre.
Le film tout entier s'attache à décrire avec beaucoup de tendresse la vie du village de Giethoorn et ses habitants, empêtrés dans des querelles intestines en lien avec "qui a la plus grosse". Fanfare. Car après moult engueulades, la fanfare locale a subi une scission et seul le groupe le plus important des deux aura le droit de participer au prestigieux concours de fanfare de la contrée (entre deux polders). Une guerre s'amorce très vite entre les deux camps pour réunir le plus de personnes possibles, pour recruter un chef d'orchestre, pour récupérer les instruments du village et autres bannières, pour avoir la sympathie du garde municipal, etc. L'occasion pour Bert Haanstra de garnir son film de gags en tous genres.
Les animaux sont omniprésents dans "Fanfare", entre une vache capricieuse atomisant ce qui pourtant s'annonçait comme un tranquille déjeuner en plein air, des grenouilles dont les coassements servent de camouflage opportun ou encore les canards souvent filmés en montage parallèle pour appuyer la dimension ridicule des différends chez les humains. Le film s'ouvre et se ferme sur des séquences animales, avec des vaches en entrées et des canards au dessert. Le film reste relativement sage et bienveillant dans la satire et cultive une sorte d'innocence dénuée de rugosité, mais l'ambiance générale rayonne une vivacité rafraîchissante et continue. On sent que toute la troupe s'est sincèrement poilé durant le tournage, à l'instar de celle de "Whisky à gogo" chez l'écossais Mackendrick (avec qui s'entretint le réalisateur pour tourner ce film). Et faire du joueur de triangle le centre de gravité de la fanfare, l'élément central pouvant faire pencher la balance du côté d'un groupe ou de l'autre (et occasionnant de nombreuses tentatives pour le soudoyer) alors qu'on ne l'entend jamais jouer, constitue l'ultime couche comique de cette farce joviale.