L'apprenti mélomane.
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le 17 avr. 2015
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Long-métrage d'animation de James Algar, Samuel Armstrong, Ford Beebe, Norman Ferguson, Jim Handley, T. Hee, Wilfred Jackson et Hamilton Luske (1940)
Fantasia, le film expérimental pour initier le public à la musique classique. Celui qui mélangeait procédés "psychédéliques" et techniques d'animation à la fois aboutissement de leur temps et en avance sur tout le reste.
C'est aussi le film qui a beaucoup joué sur les perceptions qu'on avait des œuvres présentées :
La Toccata et Fugue en ré mineur passe de simple œuvre anecdotique à abstraction pure avec formes et couleurs qui s'enchaînent et rendent matériel ce qui est censé être immatériel (la Musique elle-même). Des instruments glorifiés et mis en valeur, c'est ensuite le Son lui-même qui prend vie et couleurs.
Casse-noisette passe des tribulations d'un jouet éponyme avec des souris, à un défilement de la faune sous-marine et de la flore, des feuilles et des saisons avec la magie des fées (d'où une danse de champignons "chinois", de fleurs faisant la gigue). Magnifique fin avec les feuilles glacées par les flocons et l'hiver, d'ailleurs.
L'Apprenti sorcier avec Mickey Mouse : toujours aussi "Art Nouveau" avec son Yensid effrayant sans sourcils. Curieux quand même que sa puissance réside dans son chapeau ... Pas grand chose à rajouter, si ce n'est que les studios Disney semble adorer animer l'eau, les bulles et les maelstroms. Mickey n'arrive pas à gérer un balai même avec le chapeau de Yensid. Tandis que le magicien peut faire s'évaporer des mètres cubes d'eau (il est fort, le bougre !)
Le Sacre du Printemps passe d'un sacrifice humain aux temps du paganisme russe, à la création du monde jusqu'aux dinosaures (donc d'un point de vue plus scientifique). Des danses de la fertilité agraire, on passe à l'activité sismique et volcanique. Et du sacrifice humain, on passe à celui d'un stégosaure mordu à mort par un tyrannosaure. Ces mêmes grands lézards terrifiants finissent tous morts par la sècheresse et les tremblements de terre. C'est un de mes segments préférés car on voit notre boule de glaise passer par le cycle de la vie, de la mort et de la résurrection. Comme si toute notre planète avait été abandonnée sur l'autel de divinités invisibles et capricieuses ...
La Symphonie pastorale reste encore fidèle à l'idée de bucolique de Beethoven, mais dans un cadre plus olympien. Avec des pégases, des licornes, des faunes, des angelots, des centaures et un Bacchus plein de bonhommie et de vin, avant d'être brièvement chamaillé par Jupiter et Vulcain. Très relaxant de voir ces créatures vivent nonchalamment la plupart du temps, puis voir Iris, puis Apollon et Nyx offrir arc-en-ciel, crépuscule et nuit.
La Danse des heures troque un dualisme/manichéisme jour contre nuit ou lumière contre ténèbres, contre quelque chose de plus animalier et "mondain" : des autruches, des hippopotames et des éléphants dansent avec grâce et dignité avec leurs rondeurs, puis sont alpaguées par des crocodiles danseurs en manque de compagnes féminines). En gros, la musique devient à suspense quand les crocodiles sont horny x)
Une Nuit sur le Mont Chauve : mon autre partie préférée qui me terrifiait étant gamin. Maintenant je trouve ça assez nounours par rapport à mon souvenir. C'est la partie la plus fidèle au concept d'origine (un sabbat de sorcières, damnés et monstres adorant Satan). Pour autant, ça m'angoisse toujours autant (au moins existentiellement) de voir le démon Chernabog jeter les damnés dans les flammes de l'Enfer. Ou de voir une harpie infernale laisser tomber un adorateur du Malin dans le Néant. Véritable imagerie angoissante et dantesque assimilable à un bad trip, ce segment restera un moment de pure terreur dans ma mémoire.
Ave Maria : j'avoue que bien que Chernabog me terrifiait, cette dernière partie m'ennuyait et je préférait avoir eu plus de démons dansant dans les flammes. Cette partie me semblait surtout assez paresseuse par rapport au reste, beaucoup trop calme et peu inventive. Bien sûr, c'est parce que j'oubliais que c'était censé être en contraste immédiat avec le Mont Chauve et symboliser la victoire de la lumière sur les ténèbres. Et faut admettre que c'est plaisant de retrouver la nonchalance d'une promenade en forêt pour voir le Soleil se lever une dernière fois avant que Fantasia ne s'achève.
Ensuite, pour ce qui est des interludes : j'ai vu d'abord la version cassette des années 90 avec narrateur en hors-champ et plus de concentration sur les musiciens et leurs instruments. Puis j'ai vu la version DVD avec narrateur plus visible - probablement la version d'origine retranscrite sur le DVD édition 2010 - et explications à la qualité mitigée (assez bien pour la majorité quoique paraphrasée parfois, mais insuffisante pour donner le contexte de Casse-noisette par exemple). Il y a même un entracte de "15 minutes" (1 minute avec le titre dessus dans la version DVD 2010). Heureusement, ils ont gardé la Piste Sonore vivante.
Bref, Fantasia aura réussi à imposer son imaginaire et à faire aimer la musique classique en donnant forme à Musica elle-même, et à faire des prouesses d'animation comme à l'accoutumée. Un exploit encore adulé aujourd'hui.
Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Ces films emballés rose bonbon qui ont un meilleur goût que prévu, Big Lipped Alligator Movies !, Mes films à sketches préférés et 2023 : Mes Chroniques Filmographiques
Créée
le 15 mai 2023
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