Au début des années 90 aux USA, la mode est aux thrillers érotiques en partie grâce au Basic Instinct de Paul Verhoeven. La mode était lancée et on a vu fleurir des Sliver (1993), Body (1993), Color of Night (1994), Jade (1995) et autres Sex Crimes (1998) plus tardivement. Et à Hong Kong, où on n’est pas plus opportunistes qu’ailleurs (quoi que…), c’est la même chose, d’autant plus qu’au début des années 90, la Cat III a le vent en poupe et on a donc vu fleurir tout un tas de bobines du genre. Sauf qu’à Hong Kong, on ne fait pas les choses à moitié et, quitte à avoir la classification Cat III (interdit au moins de 18 ans donc), autant y aller à fond, et si on vire vers le sordide, ce n’est pas bien grave. C’est ce qu’a dû se dire Lo Kin, réalisateur de The Final Test (1987), Into the Fire (1989) ou encore Banana Spirit (1992), qui avec Fatal Love nous a pondu un Cat III des familles avec de la violence et des boobs, bien immoral, très sympathique pour les amateurs de ce genre de cinéma un peu déviant dont Hong Kong a le secret.


Le scénario est simple. La Police est persuadée qu’un trafic de drogue ainsi que tout un tas de crimes sexuels horribles sont liés à un riche magnat de l’immobilier, interprété par Michael Wong, sans avoir de réelles preuves. Ils vont demander à un de leurs agents qui vient de se faire renvoyer pour vol, la jolie Ellen Chan, de devenir une flic infiltrée, et d’approcher au plus près le beau et ténébreux Michael afin de voir ce qu’il en est. Une mission pas du tout dangereuse (hum) et elle accepte sans broncher. L’inimitable Michael Wong n’était pas encore ici dans sa période « je me la pète à parler à moitié anglais ». Ce n’est d’ailleurs pas sa voix qu’on entend puisque que, d’origine canadienne, il n’en était qu’à ses débuts et ne parlait pas très bien cantonais. Il a été doublé en post-prod. Il est ici très divertissant, quoi qu’un peu caricatural (comme très souvent) et sa bonhomie habituelle ne l’empêche pas d’être crédible et menaçant lorsqu’il laisse parler son penchant pour le viol et la psychopathie. La jolie Ellen Chan, qu’on va voir sous toutes les coutures, offre une prestation des plus décentes dans le rôle de la jeune recrue pas assez méfiante, même si son jeu manque parfois un peu d’intensité, surtout compte tenu de ce qu’elle voit et de ce qu’il lui arrive. On a beau avoir du sexe et de la violence, le film laisse le temps au scénario de se développer. Nous sommes ici dans un thriller qui fonctionne plutôt bien, correctement ficelé, qui nous donne toutes les pièces du puzzle dès la scène d’introduction et qui va ensuite jouer sur la possible présence (ou non) d’un twist final. La tension est bien gérée et Lo Kin arrive à très bien mettre en images la tension sexuelle qu’il y a entre les personnages de Debbie et Lau, que ce soit lors des scènes où ils s’entrainent / courent que lors des jeux de regards. Si cette tension est bien gérée, c’est parce qu’on sait pertinemment (car le film nous l’a rapidement fait comprendre) que le personnage de Michael Wong est un gros psychopathe et qu’on se pose sans cesse la question de quand il va de nouveau passer à l’acte.


Le réalisateur s’amuse avec des angles de caméra très lubriques, mais pas seulement, et de manière générale, Fatal Love est visuellement soigné. La photographie est réussie, ça s’amuse avec des filtres de couleurs et oui, la mise en scène est, mine de rien, assez solide, surtout pour ce genre de bobines souvent faites uniquement pour surfer sur une vague. Malgré tout, le montage laisse parfois un peu à désirer, en particulier en ce qui concerne la musique qui a parfois tendance à se répéter au point qu’on discerne très bien la boucle qu’elle fait. Malgré le côté comédie romantique légère en milieu de bobine, nous sommes malgré tout ici dans un cocktail de sexe et de violence, parfois les deux en même temps, avec une petite couche de sadisme et de sévices sexuels (un couple pratique l’amour violent à coups de poing, de brulure de cigarette et d’entaille au cutter). Le côté sadique est bien appuyé et même si c’est parfois hors champ, ça reste assez extrême avec du sang qui coule comme il se doit et un film qui va assez loin, même pour un Cat III. Nous sommes ici dans quelque chose de bien sordide, où la femme n’est qu’un objet sexuel, de perversion et de déviance, comme souvent dans les Cat III de ce genre par ailleurs. Nous sommes dans l’exploitation et le mauvais gout pur jus, mais tout cela est parfaitement assumé et finalement, c’est la partie thriller qui va prendre le dessus quasiment tout le long malgré une fin complètement immorale, avec en plus une musique du générique de fin toute guillerette venant accentuer le « choc » de ce final comme Hong Kong aime les faire.


Fatal Love est un film d’exploitation plutôt efficace, moralement très discutable mais étonnamment bien fichu. Un Cat III oublié mais qui pourtant ne démérite pas. Et puis il y a la belle Ellen Chan, et rien que pour ça, ça vaut le coup d’œil.


Critique originale avec images et anecdotes : https://www.darksidereviews.com/film-fatal-love-de-lo-kin-1993/

cherycok
7
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le 22 août 2024

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