Le nom du fils
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Le mélodrame est inhérent au cinéma de Michael Mann, qu’il intègre le cinéma policier ou un ancrage historique : le biopic sera ici un terrain de jeu exploité sous la forme pure du mélo, d’autant plus en choisissant une seule temporalité, puisque le film se déroule uniquement durant l’année 1957.
Enzo Ferrari vient de perdre son fils. Il tient une société au bord de la faillite, avec sa femme qui l’attend flingue en main lors de ses nuits d’infidélité. Et il a une relation secrète depuis dix ans, doublée d’un enfant illégitime. Mann choisit ce créneau là aussi car un événement cristallisera le tremblement de terre intime vécu par Ferrari : le terrible accident lors de la dernière Mille Miglia, une course de vingt-quatre heures entre Brescia & Rome, sur laquelle Enzo mise tout afin de se refaire et coiffer Maserati.
Si le film converge vers cette course le film sera très loin d’une part d’en faire son climax absolu (un peu comme la fusillade de Heat, qui est une fulgurante cassure de dix minutes ouvrant sur un abyme émotionnel d’une heure) d’autre part d’en faire une plongée totale à la façon du sublime Le Mans 66 (que Mann produisait) : le film demeure engourdi, préférant notamment la relation entre le couple Ferrari, qui à l’instar de Hanna & McCauley dans Heat, ne peuvent partager l’espace ensemble, donc le plan, mais ne peuvent paradoxalement exister l’un sans l’autre.
C’est un film sur la mort. C’est à chaud le film le plus mortifère de Mann, malgré l’ambiance italienne chaleureuse : la double scène du couple, se rendant chacun leur tour – l’un s’épanchant, l’autre restant muette – sur le caveau de leur fils, est probablement le plus beau moment de ce film mais cette scène arrive trop tôt je trouve.
La mort est partout et bien entendu aussi dans le défilé de pilotes en sursis, interchangeables. La scène de l’accident, spectaculaire suivi de la découverte du carnage par il commendatore, accompagnée par le morceau de Lisa Gerrard associé à Révélations, c’est assez traumatique, vraiment.
S’il est moins fort et radical que celui-ci, j’y retrouve une structure similaire, qui me laisse à distance dans un film comme dans l’autre. Ferrari est loin d’être parfait, à l’image des ridicules accents italiens… il faut choisir : soit c’est full en italien (avec un casting italien) soit c’est l’anglais (et c’est pas grave, j’imagine que prendre Adam Driver c’est aussi marketing) mais pas un semblant de mélange.
Quoiqu’il en soit, les personnages féminins sont toujours essentiels chez Mann : qu’ils soient gangsters, flics, mohicans, tueurs en série ou chauffeur de taxi, les hommes tournent autour des femmes. Ici, Penelope Cruz capte toutes les lumières, volent chaque scène où elle apparaît. Elle est incroyable. À contrario, le rôle incarné par Shailene Woodley est plus bâclé.
Bref, c’est dense, un peu bancal et moins virtuose qu’à l’accoutumée, mais c’est un beau film de fantômes. Macabre et pourtant lumineux, culminant dans cet ultime plan, d’un enfant et son père, dans un cimetière. Petit Mann, mais très beau film.
Créée
le 17 nov. 2024
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