(Critique V1.3)
Suite du très apprécié Fievel et le Nouveau Monde des studios de Don Bluth, il est sûr que la suite traitée par Amblin et Steve Spielberg a une technique et une philosophie différente. C'est pour ça que même si Fievel au Far West est considéré comme une digne suite par les uns, les autres le trouveront trop nanardesque en comparaison.
Commençons donc ainsi par les mauvais points :
♫In a West End town, a dead end world♫
Alors, bien que le film soit moins rapide et précipité que dans mon souvenir, il va y avoir des moments où l'animation et le rythme en font des caisses et rajoutent quelques moments exagérés et niais.
Bah déjà, ça t'exaspère un peu de voir comment les souris de New York, la plupart issues du même bateau d'immigration, percutent enfin que le "rêve américain" c'est un peu une arnaque (quitter la pauvreté de l'Europe pour rester dans la pauvreté des États-Unis). Et qu'en plus, elles font l'exploit de se faire ENCORE avoir par des chats escrocs (sauf qu'au lieu de Boniface De Rat dans le 1er film, c'est Chat R. Ton, doublé par Raymond Gérôme en VF et John Cleese en VO, qui vend un rêve de tolérance et d'entraide alors qu'il est qu'un exploiteur et un prédateur).
Tout ça pour fournir par être mangé par des chats et araignées outlaws et alcooliques au Far West dans la petite ville aride de Verte Vallée. C'est sûr, c'est pas l'el dorado pour nos souris russo-américaines tellement elle porte mal son nom, c'est plutôt une impasse désolée comme dans West End Girls, la chanson des Pet Shop Boys.
♫Sometimes you're better off dead/ There's a gun in your hand it's pointing at your head/ You think you're mad, too unstable/ Kicking in chairs and knocking down tables/ [...] In a West End town, a dead end world/ The East End boys and West End girls♫
Pour en revenir aux moments qui cabotinent pire que les chiens dans le film : certaines parties comédies musicales semblent plus niaises (surtout avec Way Out West et les chats dans The Girl You Left Behind de Tanya), moins "naturelles" que dans Le Nouveau Monde où elles étaient plus contenues.
On rajoutera aussi le fait que Papa et Maman Souriskewitz n'essayent jamais de retrouver Fievel quand ils le perdent. Autant dans le premier film c'était par résignation dépressive, mais là même l'expérience de la dernière n'excuse pas leur grosse flemme. Bonus aussi avec cette scène où Fievel pique Chat R. Ton avec une fourchette et il tombe entre les gros seins d'une femme plantureuse, ce qui est assez malaisant.
Également à déplorer légèrement : la scène avec les "Sioux-ris" assez caricaturale avec leur langage en yaourt et qui prennent Tiger pour leur Dieu à cause d'une coïncidence. Tu m'étonnes que le Nostalgia Critic n'aime pas trop ce film (une traduction de ma part, mais j'ai confondu "dawn" aube et "dog" chien vers la fin - d'oh !)
Le même Tiger fait d'ailleurs des mimiques et grognements assez troublantes pendant son entraînement. Plus quelques moments "symboliques" avec parfois de la physique pas crédible tellement elle est exagérée.
Un peu dommage que le personnage pas toujours glorieux du chien Wylie Burp, un shériff sur le déclin, soit le dernier rôle de James Stewart (icône de films de western). Cependant c'est ce même rôle ainsi que d'autres éléments qui sauvent le film.
Bref, ce sont ces quelques choix dans l'animation et le scénario ainsi que les personnages qui en font parfois des caisses qui ont pu faire que Fievel au Far West a été moins apprécié que Le Nouveau Monde lors de sa sortie au cinéma (en même temps, il y avait La Belle et la Bête de Disney au cinéma en même temps en 1991 et le western était déjà un genre un peu passé de mode à l'époque).
Attaquons ainsi maintenant les bons points :
Une étoile (de shériff) est née
Malgré le côté nanardesque de l'ensemble, il faut admettre que Fievel au Far West a une animation plus travaillée, plus dynamique (plus d'images par seconde) et que le rythme est mieux dosé que dans mon souvenir.
Et bien que reprenant quelques tropes du premier long-métrage, il ne s'y attarde pas non plus, conscient que son public les a déjà vu avant et voulant proposer autre chose sans recopier bêtement la formule. Mais la représentation du Rêve américain passe de la volonté d'intégrer une grande métropole à une forme d'exode rural proche de la Conquête de l'Ouest ou du western.
Parmi les tropes : Le coup des entrecroisements ratés entre notre souris et ses proches sont réduites ; Fievel retrouve ses proches au deuxième quart voire moitié du film pour développer une autre intrigue ; et la dernière consiste justement à chasser les chats plutôt qu'à repousser les retrouvailles entre les Souriskewitz.
La musique rend aussi l'expérience très plaisante, idem pour le doublage VF plus professionnel que dans le 1er film(notamment Alain Dorval pour Tiger, Roger Carel pour l'arachnide T. R. Chula et Benoit Allemane pour Le Borgne). J'ai aussi apprécié les jeux de mots félins de Miss Kitty (Anne Jolivet en VF).
La version VF de l'édition DVD de 2005 a aussi fait le choix de ne pas traduire les chansons originales anglophones, ce qui est plutôt une bonne idée (pas que traduire Somewhere Out There dans le 1er était mauvais, mais on perdait à la traduction en Français). Et il faut reconnaître que Tanya chantant Dreams to dreams, c'est beau ! Mais si vous voulez la version française originale, vous pouvez entendre un bout dans L'Antre de Mea.
On appréciera aussi un certain développement du personnage de Tiger et de son amitié avec Fievel et Wylie, un peu plus qu'un simple "Big Lipped Alligator Moment" dans Le Nouveau Monde. Le tout représentant un passage de flambeau du légendaire shérif canin Wylie à ses adjoints Tiger et Fievel, et avec des montages d'entraînement pour nos héros.
Et vers la fin, pas de Souris géante de Minsk, on a plutôt un combat à la O.K. Corral avec des lance-pierres au lieu de pistolets (films tout public oblige).
Tiger et Wylie effrayent les chats avec leur "regards obliques" et les propulsent à l'aide d'une tapette à souris, ironique...
Et malgré les défauts du film, il faut aussi reconnaître que la scène finale sauve l'ensemble en reprenant l'idée du passage de flambeau : Wylie (tout comme sa voix James Stewart) était sur la fin et devait passer son étoile de shériff à des successeurs, dont Fievel, avec la promesse de pouvoir rendre justice contre les oppresseurs et explorer de nouvelles contrées. Le tout devant un coucher de soleil symbolique :
Le crépuscule d'une légende voit venir l'aube d'une nouvelle.
Fievel au Far West garde donc assez d'éléments de fond et de forme pour être un film correct. Bien que considéré comme un "rêve" dans Fievel et le Trésor Perdu, il reste un beau (quoique un peu fiévreux) rêve de briller au soleil de l'Ouest américain.
Conclusion : Souris de l'Est se retrouve encore à l'Ouest.
Si on peut tout-à-fait comprendre le relatif insuccès de ce 2e opus à cause de son déroulement parfois chaotique ou cabotin, Fievel au Far West garde une supériorité technique par rapport à son prédécesseur (même si l'animation peut-être aussi sa faiblesse) mais s'il est moindre sur le fond. Bien que n'ayant pas la "maturité" du Nouveau Monde, il propose quand même de bons moments mémorables qui le hisse comme suite suffisamment digne montrant un autre revers des rêves américains. Car où que Fievel aille explorer, il devra lutter contre les exploiteurs, et ça même le 1er et le 3e film l'avaient aussi compris. Reste pour moi à voir si le 4e (Fievel et le Mystère du monstre de la nuit) est dans la même grandeur d'idée.