Dès la séquence d'ouverture, First Man dévoile ce que sera sa trame, réaliste et captivante.
Le spectateur découvre un Neil Amstrong, campé avec brio par l'excellent Ryan Gosling, pilote de haute volée et père de famille aimant, quoique peu démonstratif. Pilote expérimental, il oeuvre sur des prototypes d'aéronefs en haute altitude et risque sa vie presque à chaque vol. Son entrée à la NASA, après une sélection que l'on devine ardue, ne fait qu'assurer la continuité de sa trajectoire professionnelle hors du commun. Père de famille très attaché à ses enfants, il a tissé avec son épouse (incarnée par une Claire Foy tout à fait convaincante) un lien qui, s'il laisse transparaître peu de signes extérieurs, n'en est pas moins solide. Au vu des péripéties de son existence, la trame de ce fil sera mise à rude épreuve.
Durant le film, les séquences spatiales et d'entrainement alternent avec des plans plus intimistes, où la famille Amstrong côtoie les cimetières, les moments de tension mais aussi les petites folies quotidiennes avec les enfants. Adroitement mis en scène, ce jeu de va et vient donne au film un rythme soutenu qui ne voit pas passer les 2h22 de l'oeuvre.
Le rendu, travaillé pour procurer une sensation de film d'époque, est l'illustration d'un usage sobre et maîtrisé des effets spéciaux. Ici, pas d'effets pyrotechniques grandiloquents mais un grain qui octroie tout son réalisme aux images, en particulier celle de l'astre sélénite découvert depuis le module d'alunissage puis au travers des verrières des casques des spationautes.
Le rythme, tout aussi calculé, provoque une tension chez le spectateur à chaque nouvel essai technique. On se rend compte que cette aventure humaine fût un défi technique incroyable, poussé par la volonté des deux blocs d'alors pour imposer la suprématie de leurs idéaux respectifs au travers de cette course à la lune.
Mais si la grande aventure est au rendez-vous par instants, le réalisateur s'attarde tout autant sur la relation intime d'un couple qui vit des moments de tension énorme. Si l'on comprend que Neil Amstrong, grâce à des nerfs d'aciers et un travail acharné, parvient à surmonter toutes les étapes de ce processus technique hallucinant, on découvre une épouse dévouée qui doit affronter pire encore : l'attente. Un attente quasi insupportable, pour savoir à chaque fois si son époux fera partie du cortège funéraire qui emporte tant de ces élus de la glorieuse conquête dans l’obscurité éternelle. L'ultime épreuve durera près de 8 jours, supplice de patience pour une mère qui a voulu que ses enfants sachent de la bouche de leur père que le voyage est plus que risqué.
Servi par une bande son extrêmement soignée, alternant musique, sons et silences judicieusement choisis, First Man, en dépit que légères longueurs et images qui secouent l'estomac, réussit le tour de force de nous immerger dans une époque et dans une famille ordinaire, pourtant devenue mythique. L'alunissage est réussi !