Ce n'est pas un film-plaisir, duquel on sort enthousiaste et revigoré à la fin. Ce n'est pas non plus un film traumatisant ni triste, malgré toutes les épreuves traversees. C'est plutôt une tentative (réussie) de nous faire vivre cette expérience exceptionnelle, en immersion totale (ne manque parfois que l'agitation de notre siège). En effet, je crois me souvenir que la première fois que je lavais vu, javais été impressionné par le nombre de scènes filmées à la première personne. De plus, le film développé les dimensions "intérieures" : sensationnel, émotionnel, sentimental, moral. Chazelles a réussi le pari fou d'humaniser à l'extrême ce sujet qui demeure au départ absolument inhumain, hors norme et presque inconcevable pour notre petit esprit terrien. Ce pari est tenu grâce à l'incroyable poésie contenue dans ce film, qui relève l'aspect magique de cette événement déjà vieux de 50 ans.
Ce film montre un exemple de courage et d'honnêteté, de sang-froid.
Alors que l'on pourrait s'attendre à un traitement seulement épique du sujet, les aspect émotionnel, sentimental et moral sont particulièrement développés.
En terme d'émotions, la reconstitution des scènes à l'intérieur des capsules est remarquable. On perçoit toute l’exiguïté, les secousses, les frayeurs, avec de nombreux plans à la première personne.
Sur le plan sentimental, la vie de couple de ce couple à la fois si normal et pourtant absolument hors du commun est bien développé : ses encouragements et ses craintes, son suivi attentif ou parfois évasif du projet de son mari, la difficulté pour elle d'éduquer les enfants seule, l'impossible ubiquité parfois, avec, même lorsqu'ils sont ensemble, leurs réalités propres qui les séparent tout de même.
Enfin sur le plan moral, sont abordés la confiance (dans les théories, les calculs, la technique), la difficile conciliation entre ciel et terre, entre vie professionnelle (extrême) et vie de couple, de famille.
Alors que l'on critique parfois Ryan Gosling pour son jeu prétendument égal, il livre ici au moins deux scènes bien démonstratives : ses larmes après l'enterrement de sa fille, puis son sourire béat lorsqu'il apprend qu'il est retenu pour un nouveau poste en même temps qu'il projette d'être père une fois de plus.